Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
[ Revenir aux résultats de la recherche ]
page suivante »
                                              — 88 —
raison, l'inutile succursale des cafés des Célestins », Sans parler d'un commencement
d'incendie, de rixes entre les garçons du café et des démarches que faisait, presque
chaque saison, la direction des Théâtres de Lyon pour faire retirer aux Girard l'auto-
risation de donner des concerts au Pavillon.
      Ce n'étaient là que les petites misères du métier ou les conséquences inévitables
d'une notoriété enviée ; la question financière était alors bien autrement grave. Leurs
« innovations fashionables et artistiques » avaient absorbé tout l'avoir des Girard
— leurs 46.000 francs d'économies — les frais généraux étaient considérables et le
personnel à leurs gages fort nombreux.
      Il leur fallait d'abord payer 6.000 francs à la Ville, 1.100 francs d'impôts et 3.500
francs à la Compagnie du Gaz pour l'éclairage du Pavillon. La ferme des chaises ne
figurait qu'au passif du ménage, les agencements du local et la construction des divers
kiosques ayant coûté 25.000 francs. Enfin ils devaient rétribuer chaque mois un
premier glacier et deux aides, un chef de cuisine, un sommelier et ses aides, quatre
garçons pour le restaurant et huit pour le service des glaces, deux dames de comptoir,
quatre personnes l'hiver et quinze l'été pour la location des chaises. Les concerts
 Musard et autres se soldaient par un déficit de 15.000 francs, et l'établissement,
somme toute, ne rapportait vraiment que pendant la belle saison... I0 . Si bien qu'à la
fin de 1839, les époux Girard allaient avoir 65.000 francs de dettes.
      Dettes criardes pour la plupart, car on voit, par une série de rapports adressés à la
 municipalité, que, dans le courant de 1836, non seulement Girard n'a pas payé à la
Ville le montant de sa location pour l'année, mais qu'il vient seulement de régler ce
qu'il devait pour 1835. En 1838, le conseil municipal le mettra en demeure de s'exécu-
ter, puis, comme il n'a pas rempli les conditions stipulées au cahier des charges,
autorisera le maire à faire résilier son bail. Et l'architecte de la Ville démontrera,
toujours avec plans à l'appui, que Girard occupe actuellement, sur la place, non plus
460 mètres carrés, comme le comportait sa concession, mais 866 mètres carrés. Il
songeait d'ailleurs, à cette époque, à agrandir encore son établissement.


                                                m
      Dans le courant de l'année 1837, au moment où la situation commerciale des
Girard se trouvait gravement compromise, les Lyonnais qui fréquentaient les Tilleuls
virent M m e Girard, haut coiffée et vêtue comme l'étaient les dames de la cour à la fin
du xvm e siècle, prendre place dans cette tenue à son comptoir et faire chaque soir le
tour de la Galerie, d'abord à pied, puis à cheval, précédée d'un écuyer en uniforme de
général, avec une escorte de laquais en grande livrée rouge qui portaient deux de ses
fils.
      Comment cette idée était-elle venue à une femme de quarante ans, mère de six

   10. L'Homme de la Roche, g février 1840.