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470                   LA DEUXIÈME ÉDITION

française sont masculines. » La cantilène de sainte Eulalie
(ix e siècle), la Vit de saint Léger (x e siècle), le Roman de
Brut (xn e siècle), les œuvres de Marie de France (xn e
siècle), en font foi. Au xm e siècle, Rutebeuf, dont j'ai eu
la curiosité de feuilleter les ouvrages, n'emploie de rimes
alternées que dans le poème intitulé, la Desputoison de
Chariot et du Barbier ; le reste du temps il se sert indistinc-
tement de rimes masculines ou féminines, sans tenir
compte le moins du monde de l'alternance (10).
   A mesure qu'on s'approche du xvie siècle, on prend
l'habitude d'user des rimes alternées dans les pièces à
chanter, comme on peut le voir en parcourant les poésies
de Charles d'Orléans, ou celles plus anciennes de
ce Colin Muset, dont M. Bédier nous a donné une
 savante édition dans sa thèse latine ( n ) . Quand la pièce ne
doit pas être chantée, des rimes de même nature se succè-
dent le plus souvent. Villon, Marot, Louise Labé, agissent
ainsi. De ce qui précède, on peut donc inférer qu'à l'ori-
gine : « la loi de la succession des rimes a été dictée par la
musique », et ce qui porte à croire cette assertion, c'est la
phrase de Joachim du Bellay, écrivant jadis : « Il y en a
qui fort superstitieusement entremeslent les vers masculins
avec les vers féminins... afin que plus facilement on les peust
chanter sans varier la musique pour la diversité des mesures
qui se trouveraient en la fin des vers. » Ronsard promulgua
 définitivement cette règle dans son Art poétique, depuis
lors elle a été suivie exactement. M. Tisseur, lui, ne veut


  (10) Pour de plus amples détails sur les mètres et la versification de
ce curieux trouvère, consulter la belle étude de M. Clédat. Paris,
Hachette. Collection des grands écrivains français.
  ( n ) De Nicolao Muselo gallice (Colin Muset). Paris, Bouillon 1893.