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156 BIBLIOGRAPHIE physique, il est amené à en rechercher également,, dans le développement de l'humanité. Ces lois sont-elles mainte- nant assez connues pour qu'on puisse constater dans la vie de l'humanité une certaine suite de causes et d'effets et concevoir un système et une philosophie de l'histoire ? Condorcet l'a cru. Il affirme l'existence du progrès; mais il a manqué à la fois de logique et d'une connaissance suffisante de l'antiquité. Il admire, en effet, la Grèce, surtout sa liberté, sans songer qu'en Grèce plus de la moitié des hommes étaient esclaves. Puis, passant de la Grèce à Rome, il admire toujours, mais déjà un peu moins. Enfin, passant de Rome au Moyen Age, il n'admire plus du tout. Après avoir affirmé en théorie que le progrès existe, il nous prouve par les faits que le progrès n'existe pas; M. Ferraz montre très bien cette contradiction. Condorcet ne se contente pas d'affirmer le progrès dans le passé, il le prédit encore pour l'avenir ; il affirme entre autres que la science se développera indéfiniment, et que le développement de la science entraînera nécessaire- ment le développement de la moralité. On le voit, nous sommes en pleine utopie, et M. Ferraz a bien raison de faire des réserves sur ces prédictions singulières. Comme Condorcet, Volney admet la loi du progrès ; il ajoute toutefois à ses idées des préjugés religieux qui sont loin de les améliorer. On est étonné surtout de voir la base qu'il donne à cette évolution progressive. « Conserve-toi », tel est, suivant lui, le seul principe de la morale, et par conséquent la seule cause du progrès. Pour le coup le sys- tème devient tout à fait dangereux, car si deux hommes sont menacés de mourir de faim, que devra faire le plus fort ? M. Ferraz ne se pose pas la question, mais ses lecteurs n'y perdent rien.