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                   A TRAVERS LA KABYLIE                        6j

pères de famille ont résisté. Ils n'admettaient pas qu'on
prétendît faire leur bonheur malgré eux; on les a menacés.
Quelques-uns se sont soumis de bonne grâce, mais ils se
proposaient seulement d'acquérir par là, pour eux-mêmes,
les faveurs de l'Administration. Ils ne se sont pas trompés:
on leur a accordé des récompenses; mais ils n'ont pas tou-
jours obtenu celles qu'ils ambitionnaient. L'un d'eux, créé
officier d'Académie, est venu trouver, il y a quelque temps,
l'Administrateur de sa commune, et lui a tenu ce langage :
« J'ai entendu dire que la violette était faite pour les savants;
moi je ne suis pas un savant : pourrais-tu me la changer
contre la rouge? » fp. 137).
   Le petit Kabyle est doué d'une bonne mémoire et peut,
jusqu'à l'âge de douze ou treize ans, se mesurer, sans trop
de désavantage, avec le jeune Européen. Mais dès qu'il
s'agit de penser par lui-même et de raisonner, il se montre
d'une incapacité complète. Depuis de longs siècles, la mé-
moire seule a été cultivée chez les musulmans. Dans leurs
écoles tout se borne à réciter le Coran, Les maîtres eux-
mêmes n'ont pas d'autre bagage intellectuel que ce qu'ils
ont empilé dans leur mémoire. Le vrai savant, l'alem, est
celui qui, étant posée une question, peut réciter immédia-
tement les textes des auteurs qui l'ont traitée. Le taleb
indique seulement où se trouvent ces textes. Quant à en
faire l'application, ils en sont incapables. En somme, leur
intelligence ne se développe pas ; ils ne savent que des mots,
et on pourrait les comparer à cette espèce de poissons,
trouvée dans les puits artésiens du Sahara, qui, enfouis
sous terre depuis de nombreuses générations, et n'ayant
plus eu à exercer son organe visuel, se trouve aujourd'hui
aveugle. Les écoliers, eux aussi, n'apprennent que des mots.
On en trouvera des exemples p. 137. Il n'est donc pas éton-