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206 LETTRE D'UN LYONNAIS D'ALGÉRIE nais du temps de Charles IX, les sieurs Tortorel et Péris- sin. Tout se retrouve à son heure et finit par aboutir à sa fin. Sans m'embarrasser des causes finales, j'articule qu'il n'y a collection si vaine ou si bizarre qui ne serve à quel- que chose. Je parle des collections que nous faisons, nous et nos amis; car celles des autres, naturellement, ne sont que des amusettes. J'abonde donc dans votre vue sur toutes ces affaires. Maintenant, il faut que je vous en dise un peu de plus sur ce sujet, à côté, ou plutôt en le prolongeant : car ce point où j'en viens, en tirant de longueur, me tient fort aussi à l'âme. J'espère ne vous point donner d'un coup une moindre opinion de moi, en vous confessant que les anciennes choses du passé ne sont point les seules qui me touchent, et que je ne collectionne point que des vieilleries... Mais une telle aposiopèse est inconvenante. Le souvenir de cet esprit large et ouvert en avant et en arrière, dans tous les sens, sur tout le domaine de l'intelligence, de cet esprit éveillé à toutes les sensations propres à augmenter la na- ture humaine, de cet esprit qui, tout en affectant avec un air de bonhomie une prédilection pour les choses du passé, n'y voit que le réservoir de l'avenir, de cet esprit enfin qui est le vôtre, aurait dû tenir ma plume. Ici encore, je le parierais de reste, nous serons d'accord : je veux dire que j'aurai le bonheur d'avoir votre approba- tion. Je ne suis point Lyonnais : il faut bien le dire, Monsieur. Et si je suis contraint de vous parler de moi, c'est que cet exemple est encore le meilleur que j'aie sous la main. Je ne suis point Lyonnais de naissance, si je le suis d'édu- cation et presque de tempérament. Je suis né en Algère,