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ET LA POÉSIE PHILOSOPHIOJ-IE 101
l'idéal, tout cela se trouve, non seulement dans la conclu-
sion assez vague de ce poème philosophique, mais dans
ces pièces détachées si nombreuses, plus connues, sur les-
quelles plus que ces œuvres si originales, s'est fondée la
réputation de Sully-Prudhomme. Envolons-nous vers ces
horizons moins extraordinaires, mais plus sereins. Une jolie
poésie intitulée l'Hirondelle, charmant appel allégorique
aux sentiments élevés et purs, nous servira de transition :
Toi qui peux monter solitaire
Au ciel sans gravir les sommets,
Et dans les vallons de la terre
Descendre sans tomber jamais;
Toi qui, sans te pencher au fleuve
Où nous ne puisons qu'à genoux,
Peux aller boire, avant qu'il pleuve,
Au nuage trop haut pour nous ;
Toi qui pars au déclin des roses
Et reviens au nid printanier,
Fidèle aux deux meilleures choses,
L'indépendance et le foyer.
Comme toi mon âme s'élève,
Et tout à coup rase le sol,
Et suit avec l'aile du rêve
Les beaux méandres de ton vol.
S'il lui faut aussi des voyages,
Il lui faut son nid chaque jour.
Elle a tes deux besoins sauvages :
Libre vie, immuable amour (14).
G.-A. HEINRICH.
(A suivre.)
(14) Stances et poèmes. La Vie intérieure, p. 21. L'Hirondelle.