page suivante »
56 DEUX AMITIÉS ces plaintes-là est déjà par lui-même une consolation. Tu sais combien je me plais aies entendre. — Ah! il faudrait en avoir le temps ; j'ai beaucoup de chose à ajouter sans doute à ces adieux que j'ai composés en laissant courir ma plume avec mon cœur, mais il faut que je travaille à cet écran de tapisserie que l'on réclame. — Le travail est un grand consolateur, ma fille, dit me M Desnoyelle toute heureuse de voir les pensées de sa fille reprendre une direction active, il met de l'intérêt dans la vie la plus monotone. Ah ! chère enfant, j'ai bien souf- fert déjà et souffert avec courage, mais si je te voyais triste, malheureuse, ma souffrance serait insupportable. — Rassure-toi, mère si bonne, toi; les travaux de l'esprit et ceux des doigts adouciront d'abord, puis chasseront tout à fait ma peine. En achevant ces paroles, Marie donna un baiser à sa mère, effaça, par un courageux effort, la teinte de tristesse qui voilait sa physionomie et rentra pour s'occuper du petit ménage dont elle partageait les soins avec Mme Desnoyelle. II Tout fait événement dans un village : aussi ne faut-il pas s'étonner qu'on s'occupât beaucoup de la locataire de Mme Werner. Nous ne voudrions pas affirmer que Marie ne s'efforçât de l'apercevoir lorsqu'elle descendit de voiture en s'élevant quelque peu au-dessus de la haie qui séparait son jardin de celui de Mme Werner. Mais sa curiosité fut plutôt éveillée que satisfaite, car l'étrangère, en mettant pied à terre, ouvrit une ombrelle qui déroba ses traits aux regards de la jeune fille.