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RENÉ DE LUCINGE 383 chevalier découvrit parmi eux une espèce d'honneur, de lois équitables et l'amour de la gloire à leur manière. Se faisant expliquer leurs ressources, leurs richesses, il fit hâter leurs préparatifs pour une descente à Rhodes, espérant trouver sous ses murs la mort ou la liberté. • Voulant à tout jamais cacher le nom de son père aux brigands devenus ses maîtres, René accepta Je nom d'Occhioli, celui de leur ancien chef, et bientôt le cou- vrit d'une gloire qui remplit tout l'Orient. III LE FORBAN Sous un ciel d'azur, resplendissant de tous les feux du firmament, trois vaisseaux bien armés fendent rapidement les flots, poussés par un vent favorable. A bord de ces navires tout est silencieux, et n'étaient les pilotes placés à la barre, leurs ponts seraient déserts ; les équipages se sont livrés au sommeil. Seul un homme veille ; à son cos- tume brillant, on reconnaît un chef ; penché sur les bastin- gages, il jette sur la mer un regard mélancolique. La pen- sée de notre héros, que nous retrouvons avec la veste lé- gère des forbans, leur arme et leur turban, est aux lieux de sa naissance ; il rêve de sa patrie, de sa famille, de ses amours, et une plainte amère sort de ses lèvres. —Déplorable destinée, fortune cruelle, qui d'un noble chevalier fait en ce jour un forban ! Tout m'échappe à la fois: gloire, amitié, patrie. Puis entrouvrant son vête- ment, il presse de ses lèvres cette rose desséchée, qui lui rappelle un souvenir fugitif de bonheur ; il voit encore la femme qu'il aime, parée de tous ses charmes, de toutes ses vertus. Il l'aperçoit voilée et mystérieuse, au fond de