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dSO                  MON AMI GABRIEL

tre il revoyait son propre passé : les chagrins de sa
première jeunesse et la touchante image de sa mère, les
folles aspirations et les nobles enthousiasmes, les steppes
immenses de l'Afrique, les chevaux arabes, les courses
à tous crins sous le soleil de plomb et la lumière aveu-
glante ; enfin tout ce passé d'hier qui lui semblait déjà
si loin et qui se rattachait aux dernières paroles de ses
amis et su récit du docteur, Gabriel le revoyait les yeux
fermés, en un instant il revivait toute sa vie.
  Louise dormait : son blanc visage encadré de boucles
brunes était tourné vers lui et empreint d'une suave
expression.
   Bientôt, elle vint à blêmir, ses traits prirent l'aspect
rigide de la mort ; Gabriel vit se dessiner vague-
ment un profil qu'il connaissait et qu'il avait cru
entrevoir quand on avait parlé de la promeneuse du Parc.
Ces cheveux noirs sur cet autre visage avaient quelque
chose d'effrayant. Mon ami se leva pour chasser cette
étrange hallucination, s'approcha de Louise, et l'em-
brassa doucement. Puis il parcourut la chambre du
regard, se pericha sur le berceau, contempla longuement
le petit qui respirait la bouche entr'ouverte, et, tout pé-
nétré d'un sentiment nouveau, il déposa sur cette petite
tête rose un gros baiser paternel qui réveilla l'enfant
avec de grands cris.

                               EMMANUEL VINGTIUNIER.

      (A suivre.)