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LE PONT DE M BOUCLE 107 vre toutes les prescriptions du cahier des charges et du dé- cret de concession. Le pont devait être garanti par des brise-glace solidement établis et avec de bons matériaux ; il ne se conforma pas à ces prescriptions, car l'expérience vint bientôt démontrer que ces brise-glace ne pouvaient pas résister au moindre choc, puisqu'ils ont été renver- sés plusieurs fois, même par le seul courant rapide des grosses eaux. La Compagnie crut devoir intenter un procès au sieur Pitrat, mais les tribunaux le dégagèrent de toute respon- sabilité, la faisant retomber sur l'architecte dont l'entre- preneur avait suivi les plans qui étaient vicieux et que les Ponts et Chaussées n'auraient pas dû accepter. Ce n'est que plus tard qu'ils se sont aperçus de leur erreur. Le pont devait coûter 440,000 francs, prix du forfait convenu avec l'entrepreneur ; mais ce dernier présenta un compte de travaux supplémentaires et d'augmentations sur les fers, s'élevant à 24,580 francs. La Compagnie a dû payer (car elle y a été condamnée) tous ces brise-glace inutiles, puisqu'ils étaient mal faits et qu'ils ne garantis- saient rien ; elle croyait ces armatures comprises dans le forfait. Elle a dû payer aussi d'autres travaux et four- nitures auxquels elle était loin de s'attendre. Le capital de 140,000 francs ayant eu déjà beaucoup de peine à se compléter, la Compagnie fut fort embarrassée pour faire un nouvel appel de fonds : personne ne voulut plus pren- dre d'actions. Cependant l'entrepreneur, qui avait obtenu gain de cause devant toutes les juridictions contre la Compagnie, la poursuivit à outrance, et le pont fut sur le point d'être vendu, le 30 avril 1875, par expropriation forcée. Devant cette extrémité fâcheuse, ne pouvant plus trouver de l'argent auprès de ses actionnaires, la Compa- gnie fut forcée d'emprunter par hypothèques sur le pont,