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NOUVELLE DAUPHINOISE. , . 233
mari... Après un prompt et tendre secours, elle revient Ã
elle...
— Ah ! dit-elle, tu l'as vu mort, n'est-ce pas, mon pau-
vre amputé ?
— 'Oui, mère Jeanne, répond le jeune homme ; je l'ai
bien embrassé vivement pour vous tous f... Mais avant le
combat, il m'avait fait promettre que, s'il succombait, je
prendrais sur lui un papier qu'il portait toujours, Ã l'en-
droit du cœur.».. Le voici, tel que je l'ai trouvé ; seulement,
j'y ai ajouté une mèche de ses cheveux noirs', que je n'ai
pas oublié de couper. Je venais de remplir ces devoirs
d'am,i) et j'avais bien placé son corps, ne pensant plus Ã
moi-même, car je croyais la bataille finie, mais ces Prus-
siens nous faisaient une guerre si déloyale que... boum I...
un obus attardé arrive, éclate et m'enlève un bras, comme
vous voyez. Heureusement, j'avais déjà mis les chères re-
liques dans ma poche... Les voici :
— Pauvre Victor 1 au milieu de tes propres douleurs,
tu pensais encore à nous !... '
Le paquet de deuil fut ouvert... Il contenait une boucle
soyeuse de cheveux blonds, — ceux de Marguerite ! —
Avec deux photographies représentant Jeanne et la jeune
fiancée...
— Je n'attendais plus que cela pour mourir! dit la pau-
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vre mère, en pleurant toutes ses larmes; mon fils!... mon
Julien!... et elle baisait les cheveux noirs, puis, les che-
veux d'.or, et s'écriait :
— Dieu a réuni dans sa gloire ces deux cœurs d'anges !
Ils s'aimaient trop pour les séparer!... Ils m'attendent!...
Je veux partir!... Julien! tu m'appelles!...
Le vieux père François ne disait point au jeune homme :
— Raconte-moi la bataille.
C'était un signe évident de désespoir, pour qui connais-
sait le goût du villageois pour les faits d'armes. Mais l'or-
gueil paternel reprit tout à coup le dessus ; il s'écria, avec
une saisissante expression :