Revue du Lyonnais » série 3 - n°14 ( 1872 ) » pp.478

 '478              UNE ARRESTATION EH BAUPH�NÉ.

   qui se la réfléchissent comme deux glaces qui se répètent
   à l'infini la même arcade, l'inquiétude isolée de tout cal-
   mant et multipliée en tous sens par deux têtes qu'elle
   égare, l'inquiétude, dis-je, n'est plus un sentiment, c'est
   une torture, c'est un horrible et inguérissable m a l a i s e . . . .
     Un mois entier s'écoula sans événements depuis cette
  néfaste soirée ; M me la duchesse ne quittait pas son lit, et
  M. de Gaétan, qui paraissait en proie à une profonde dou-
  leur, ne sortait plus de son appartement et avait oublié
  pour sa femme tous les plaisirs et toutes les belles dames
  de la ville. C'était le moment de l'été, où chacun avait
  presse de retrouver ses champs ; chaque jour, une des no-
  bles familles de Grenoble fermait soigneusement ses a p -
  partements jusqu'à l'hiver prochain et se hâtait d'aller
  retrouver ses vassaux et ses chasses, près du vieux ma-
  noir de ses ancêtres, ou fuyait la ville et son insupportable
  chaleur par toutes les routes qui rayonnent autour de ses
  portes : bref, c'était le moment où on proclame qu'il ne
 re_ste personne , et ce propos était déjà si vrai qu'à peine
 M. de Saint-André et son second trouvaient encore un
 salon ouvert pour s'y délasser de leur affreux passe-temps
 de toutes les nuits, c'est-à-dire de surveiller lés routes et
 de poser des sentinelles à toutes les issues de leur demeure.
    M. de Saint-André remarqua bien vite, dans ses rares
 visites, que les Espagnols n'étaient plus le sujet de la
 conversation dès qu'il mettait le pied dans le monde ; on
ne lui en parlait plus que rarement, à moins toutefois
que la figure de M. Le Clair, que l'on rêvait toujours au
milieu d'une sarabande, ne fit demander des nouvelles de
M me la duchesse ; à peine écoutait-on sa réponse : c'était
bien mal, mais qu'exiger du public? Les Espagnols étaient
vraiment dans leur tort avec lui ; ils avaient dû partir
sous trois jours, ils avaient fait leurs adieux à tout le
monde , on les avait regrettés bien vivement dans le mo- •
ment, mais il fallait se consoler et se créer de nouvelles,
distractions , puisqu'ils allaient'disparaître ; en un mot,




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