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174                  IKGO 3T VAQUEBIE.

vallons, nous arrivions par mille et un sentiers secrets à
surprendre, au milieu des forêts ou des rochers, des neiges
ou des pâturages encore inexplorés, le sommeil enchanté
de la rêveuse nature, — cette belle au bois dormant, —
dont les bras demi-nus, mollement arrondis sur son chevet
de mousse verte ou voluptueusement étendus hors sa couche
de feuillage sombre, ne se laissent effleurer que par les
baisers discrets du pâtre ou du poète !
     Cependant, ce jour-là, et en cette matinée, où je me
retrouve et me reprends à galoper sur nos montures de
louage, côte à côte avec le cher abbé Dauphin, nous
étions tous les deux partis de bonne heure et en singu-
lière joyeuseté ; — partis comme part un violent éclat de
r i r e ! En vain, l'aube nous cligna de son Å“il gris, darda
ensuite sur nous sa prunelle cerise, puis nous lança ses
dards de feu ; ni elle ne nous reconnut, ni elle ne réussit
à rendre plus sérieux ses contemplateurs habituels. Oh !
oh! nous rions à pouffer sur nos mules, qui en piaffaient
d'autant ; nous rions à nous tordre contre le pommeau
de nos selles, et nous n'en talonnions que plus fort
et à qui mieux mieux nos pauvres bêtes; celles-ci, à leur
t o u r , secouant les oreilles, dressant la queue, ruant
sautant, pétant et pétaradant, et se démenant des quatre
membres, sentaient bien, mais ne comprenaient en rien
cette bruyante et bàtonnante hilarité. — Pas plus que
vous, n'est-ce pas, ami lecteur? — Attendez un peu.
Nous voilà arrivés, après deux heures de course folle, et
en deux mots de description modérée au fond de la
fameuse vallée du Lys, gigantesque cirque, aux parois
duquel, entre les mélèzes et les pins, s'échevèlent à
tous crins et de toute hauteur, deux chutes d'eau furibon-
des, la cascade du CÅ“ur et la cascade d'Enfer ! .
  Non loin du torrent bouillonnant et verdâtre qui réu-