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188 SOCIÉTÉ DES AMIS DES ARTS, sentant et voyant de même, ayant les mêmes goûts, sem- blent ne plus faire qu'un. Et M. Chenu est bien l'homme qu'il faut pour ce genre, l'ensemble et les détails se gra- vent dans sa mémoire, et sa main habile et prompte a_ à peine entrepris le tableau que l'aspect général s'entre- voit et l'œuvre est vite achevée. Mais dans cette amitié de l'artiste et de son public n'y a-t-il pas d'un côté comme de l'autre un peu trop de complaisance ? Le même succès ne s'éternise-t-il pas trop, et n'est-il pas regrettable de voir M. Chenu, l'homme remuant et exubérant, s'immo- biliser presque dans la reproduction continuelle d'un même effet, Y effet de neige ? Il y a inconséquence entre ce travail de parti pris et de mémoire dans l'atelier, et le caractère original, improvisateur de ce coureur intrépide à travers champs en friches et sensations nouvelles. L'œil, surpris, charmé, voit toujours clair et juste dans ces spec- tacles divers aux changements brusques, mais la main ne se mettant plus au service de l'esprit fécond et chan- geant risque de s'amollir dans un travail uniforme, de même que l'homme et l'artiste dans ce commerce facile de la foule courtisane. Que M. Chenu revienne à sa na- ture vraie qui veut l'impression toujours neuve se mani- festant aussitôt dans une œuvre primesautière ! Quel travail différent dans l'esprit de M. DOMER! MM. Carrey, Bail, Vernay et Chenu rendent plus ou moins naivement ce qu'ils ont vu dans la nature même, interprètes d'une impression réelle. M. Domer fouille dans les livres, et l'idée-mère de ses œuvres se retrouve dans les longues épigraphes dont il émaille le livret. Il va de Théocrite à Ossian, de la Bible à l'Histoire des ducs detBourgogne, cherchant le scénario d'une saynète, d'une idylle, d'un ballet ou d'un drame. La toile immense, le-mur, la coupole ne l'effrayent point, et il se repose le