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                   CHRONIQUE LOCALE


   Napoléon le Grand , ceci n'est pas de la politique, prétendait, et
il était bon juge, que rien n'égalait la froide valeur des Bressans,
quand ils avaient cassé leurs sabots.
   Cet aphorisme nous revenait en mémoire, en écoutant la brillante
conférence du capitaine Lambert, sur sa future expédition au pôle
nord.
   Le capitaine Lambert a cassé ses sabots, les petits sabots qu'il
avait à Griéges , quand il errait, enfant, sur les bords delà Saône et
de la Veyle, et plus tard à Priay, quand il allait pêcher les truites
de la rivière d'Ain. Il a pris des souliers, est allé au Nord et au Midi
et est tout prêt à retourner au Midi jusqu'au cap Horn, pour remonter
le Pacifique , jusqu'à l'endroit béni du ciel, où, au milieu d'un prin-
temps perpétuel, tourne sur lui-même sans changer de place l'axe de
la terre.
   Le capitaine Lambert invite les hommes de cœur à l'accompagner.
Avec une franchise digne des temps antiques , notre vaillant compa-
triote déclare que son expédition ne sera pas lucrative, au contraire,
mais il prédit à ses compagnons de voyage une gloire éternelle dans
l'avenir.
   Il ne cache pas les dangers et les inconvénients. On mangera du
morse ou de l'ours blanc , on sciera les glaces pour se frayer un pas-
sage , on brûlera de la baleine en guise de charbon de terre , et on se
soufflera dans les doigts tant qu'on traversera la ceinture glacée qui
sépare la terre connue de ce petit morceau, infiniment le plus beau,
que nous ne connaissons pas.
   Nous aimons ce fier programme, et quand les Vasco du Nord ouvri-
ront leur voile, ils seront "certains de nous voir les accompagner avec
 enthousiasme de nos vœux.
   — Un autre Gama, escorté de deux sauvages favoris du public,
continue à passionner la foule au Grand-Théâtre. Privilège du talent,
il remue les masses. Que Sélika aime Raoul ou Roméo, qu'elle meure
misérablement empoisonnée, ou, comme l'autre jour, maladroitement
fusillée par un ehassepot qui rate , elle n'en fait pas moins couler des
larmes et remplit la salle des plus chaleureux applaudissements.
   — Ne sont-cc pas les fils de ceux qui ont demandé la centralisation
politique qui aujourd'hui réclament si ardemment la décentralisation
littéraire, comme si l'une n'entraînait pas l'autre forcément?
   Nos décentralisateurs viennent de remporter une victoire. On a
joué ces jours-ci aux Célestins une charmante comédie qui, quoique
lyonnaise, a parfaitement réussi. Le Secret de Jeanne est la première
oeuvre de M. Victor Chauvet. Encore un succès pareil et nous ne dou-
tons point qu'aussitôt notre jeune provincial ne s'envole à Paris.
  —• Il nous quittera aussi ce nouvel écrivain . M. Victor d'Azur, qui
vient de lancer son Régiment fantastique, œuvre plus sérieuse qu'elle