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•258                        POESIE.


            LES SCRUPULES DE LA MORT.

Enfant mal accueilli comme un fardeau qui gêne,
« 0 madame la mort, disais-je, à mon secours! »
Mais elle : — « Cher bébé, j'aime à trancher des jours
« Pleins d'azur ; j'attendrai que le ciel t'en amène. »
A vingt ans, repoussé par la beauté hautaine,
« Cette fois, c'en est fait, criai-je à l'autre, accours! »
Mais elle : — « J'ai souci des cœurs pris à leur chaîne,
« J'attendrai que tu sois aimé de tes amours. »
Plus tard, nouveaux appels (je débutais poète) ;
Mais elle : — « Je fais cas d'un laurier sur la tête ;
« J'attendrai qu'on t'imprime, et que tes vers soient lus. »
Aujourd'hui, las de tout, je l'implore; mais elle :
« Non pas ! ton âme aspire à l'heure solennelle ;
« J'attendrai pour venir que tu n'y songes plus. »

                   RES ANGUSTA DOMI.
Tout poète, en loyer, reçoit de la nature
Un domaine idéal que défriche l'esprit.
Je n'obtins qu'un arpent, mais ce lot me sourit ;
Qu'un plus riche à tenter l'infini s'aventure.
Dans mon jardin fermé d'une étroite clôture
Croît le pampre enivrant, l'épi dru qui nourrit,
La fleur qui plaît à l'œil, la plante qui guérit ;
Un petit dieu bénit me petite culture.
Moins d'espace me fait nécessité du choix;
Force jets m'advenant, j'en tranche deux sur trois ;
Le terrain s'agrandit de la place émondée,
Si bien qu'à force d'art et de soins obstinés,
A la fin j'ai du sol en excès ; et, tenez !
Il me reste ce vers à semer d'une idée.