Revue du Lyonnais » série 3 - n°2 ( 1866 ) » pp.314

314                ON NE CROIT PLUS A RIEN.

 quelques moyens d'existence, et, sachant que Lyon était
 déjà un foyer considérable de la lumière nouvelle, je vins...
     — Ah ! le café, mécriai-je, ne le laissons pas refroi-
 dir...
     La mère Mouchereau ayant versé avec autorité, pendant
 qu'elle allait et venait, enlevant les débris du festin, nous nous
 livrâmes, avec notre facilité ordinaire de recueillement, à
 l'appréciation muette de son moka, lequel, sans être pur de
 toute interpolation, n'était point sans mérite.
     Notre vieille Hébé du cordon ayant fini son manège, venait
 de passer la porte, quand elle la rouvrit tout a coup.
     — A propos, monsieur, dit-elle, dans tout ce tracas, j'ai
 oublié de monter une lettre pour vous....je vais la....
     — Une letfre?.... J'avais tressailli, regardant Gobson,
 qui devint aussi pâle que moi... nous nous étions compris.
     Je m'élançai comme un tigre sur la Mouchereau, qui tenait
  encortî la porte entre-bâillée :
     — 11 y a une lettre ! ! criai-je d'une voix tonnante, et
 vous ne l'apportez pas?... femme stupide ! !.. courez donc !
 mais, courez donc, malheureuse !!....
     Épouvantée , elle s'enfuit avec fracas , semant quelque
vaisselle dans l'escalier.
    Je revins tomber dans mou fauteuil, suffoqué, haletant...
Le brave médium était aussi bouleversé que moi ; il tour-
nait dans l'appartement avec une agitation fiévreuse.
     — Cette lettre !.. mon Dieu ! cette lettre... murmurai-je
d'une voix étranglée.
    — La... du calme... la voilà... elle va venir... disait-il,
allant à la porte et revenant à moi         elle monte.... là
je l'entends.... calmez-vous.
    Nous n'en pouvions plus, l'un et l'autre, quand un bras
s'allongea par la porte entr'ouverte, tendant le papier fatal...
    Je me précipitai       Hélas ! ! un regard jeté sur l'adresse,