page suivante »
ET SUR EINSIDËLN. 133 semblait appuyer sur quelques vertus ou faits saillants de la vie du bienheureux, un redoublement d'attention se fai- sait sentir. Le soir, le canon de la ville mêla ses détonations au bruit des cloches; toutes les maisons s'illuminèrent; la musique militaireexécutaitde joyeuses fanfares, et, de temps à autre, la foule faisait entendre le cri: Vive le bienheureux Cani- siusf En voyant une telle démonstration, qui partait ainsi de l'élan spontané de tout un peuple, je me rappelai notre fête annuelle du 8 décembre à Lyon, et je dis que, même au milieu de notre XIX e siècle, il n'y avait que les saints de vraiment populaires. Ce fut un grand chrétien, au siècle où il vécut, que Cani- sius. Né à Nimègue en 1521, à l'aurore de la Réforme, il entra dans la Compagnie de Jésus, du vivant de saint Ignace de Loyola, qui put apprécier par lui-même son mé- rite supérieur et montra l'estime qu'il en faisait en l'en- voyant au Concile de Trente avec Lainez et Salméron.Dieu, qui le destinait à être le champion de la foi contre l'hérésie, lui donna avec la vertu , la sagesse, la science et le cou- rage. L'Allemagne retentit de ses prédications ; il y rem- plit les fonctions de Nonce de Pie IV; il soutint la religion en Pologne-, refusa, à plusieurs reprises , les dignités de l'Eglise qu'on lui offrait, et vint terminer sa carrière à Fri- bourg, qu'il servit à protéger, comme un boulevard inex- pugnable, contre l'invasion de l'erreur. Il joignit, dit le doc- teur Berchtold, au zèle de l'apôtre, l'habileté du diplomate, l'humilité d'un saint et l'érudition d'un savant. Les fêtes de Fribourg ont ému le protestantisme, et, du fond du sépulcre où les sectes le décomposent lentement, il a donné signe de vie. Je lisais tout à l'heure, en courant, dans le Journal de Genève, sur les ovations fribourgeoises, une critique en apparence modérée, où l'on opposait à cet élan d'enthousiasme quelques froides plaisanteries. A tra- vers des douceurs, équivoques, se montraient çà et là les suintements d'un fiel mal contenu. On s'y étonnait, par