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ÉTUDE SUR LES GUERRES DE RELIGION. 29 A quel résultat politique cependant pouvait aboutir ce sou- lèvement redoutable? Si le protestantisme l'avait emporté, re- ligion d'une minorité et voulant être religion d'Etat, il aurait opprimé la France en la bouleversant ; contenu et réfréné par les catholiques, il l'a troublé, a fomenté l'anarchie a la place et sous le nom de la liberté et par un inévitable retour a laissé ensuite la nation plus avide de repos que d'indépendance. Les hommes dont la foi religieuse repousse le protestan- tisme, et dont le patriotisme aime la liberté sans révolutions, ne regretteront jamais assez que le;; efforts et les ressources dépensés dans le camp des réformés, pour le triomphe de la secte nouvelle, n'aient pas été consacrés parmi nous k maintenir et développer sans désordre les vieilles franchises nationales. Quels grands citoyens que les d'Aubigné, les Du . Plessis-Mornay, les Coligny,s'ils n'avaient pas été des sec- taires ! Hommes d'épée et hommes de plume, chefs d'armée et chefs de parti, publicistes, diplomates, orateurs, ils sou- tiennent des polémiques religieuses, ils organisent des trou- pes,ils commandent des batailles et se battent eux-mêmes en soldats ; ils dominent, par le seul ascendant de l'éloquence et du caractère, des assemblées indisciplinées; ils conseillent des princes ; ils conduisent des négociations; enfin ils exer- cent ensemble toutes les facultés de l'intelligence, ils par- courent k la fois toutes les carrières de l'activité humaine et par dessus tout,k travers les vicissitudes de la fortune la plus orageuse, leur âme demeure indomptable. Le plus grand de tous, Coligny, étranger aux premières conspirations de ses corréligionnaires, répugnait k la guerre civile. Sa femme l'y décida, ne pouvant souffrir qu'il laissât périr ses amis sans être avec eux, et une fois engagé comme malgré lui, il mon- écrits polémiques du XVIe siècle, donnée par M. Baudrillart. ( Bodin et son temps : introduction ).