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ÉLOGE DE RAVEZ. 225 récemment encore, après l'apaisement de toutes les pas- sions, au sein d'un barreau où les personnes et les carac- tères sont si parfaitement connus, un discours prononcé (1) dans une circonstance solennelle a rappelé les faits et les principes. En effet, si le dévouement spontané du Barreau a sa gran- deur, son indépendance a ses droits. Au criminel comme au civil, l'avocat garde la liberté de son ministère, comme la responsabilité de sa parole. Si une cause ne peut être sou- tenue que par des doctrines ou des faits que sa conviction ne peut admettre, il laisse h d'autres une défense qui serait faible ou inconséquente dans ses mains. Mais la loi et l'humanité ne permettent pas que l'accusé reste sans défenseur. S'il ne s'en présente point, les tribunaux en désignent un d'office. Alors le devoir de l'avocat commence : il ne répond plus à la demande d'un client, il obéit a l'appel de la Justice. Ainsi Ravez , à qui un tel appel n'avait nullement été fait, était le libre appréciateur de la cause, et le. seul juge de son propre devoir. Il ne devait compte h personne de son intime pensée, et cependant, si on admet son refus comme certain, ce refus se justifie par les plus graves motifs. Celui qui, à vingt et un ans, défendit au péril de sa vie les victimes poursuivies par les passions populaires, ne pou- vait redouter un gouvernement dont il était l'ami; il son- geait moins encore à le flatter, car alors, et même long- temps après, il refusa toutes ses offres. Eût-il manqué aux devoirs de sa toge, au moment même où il déclinait toutes les dignités pour lui rester fidèle ? Non, la crainte et la fai- blesse étaient également au-dessous de son âme. Mais Ravez n'en n'était pas moins personnellement identifié avec le (1) Voir l'Eloge de Ravez, par M. de Chance), déjà cite. 15