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NÉCROLOGIE. Maréchal de CASTELLANE , M. Octave VINCENT de Saint-Bonnet, M. Xavier BASTIDE. Le maréchal comte de Castellane a laissé trop de souvenirs dans notre ville pour ne pas appartenir à notre.nécrologie lyon- naise ; nous n'esquisserons cependant qu'avec mesure cette vie légendaire dont nos confrères de la grande presse ont rappelé à plaisir la puissante originalité. Bravoure, sévérité militaire, ser- vices rendus, haute naissance, tout a cédé le pas aux excentri- cités qui feront vivre son nom. Un jour, en 18S3, nous allions de Berne à Fribourg, encaissé dans la diligence à côté d'un grave et doux jeune homme aussi spirituel et intelligent que silencieux ; la voiture roulait à travers ces magnifiques montagnes qui font de la Suisse un si beau pays. Tout à c o u p , devant un paysage plus resplendissant, notre compagnon s'écrie : — Avouez , Monsieur , que notre patrie est bénie du ciel ! — Oui, Monsieur. La Suisse est le plus beau pays du monde , et chaque fois que je la parcours c'est avec un nou- veau ravissement. — Ah ! vous n'êtes pas Suisse , Monsieur ? — Non, Monsieur , je suis Français, j'habite Lyon. — Lyon ? tiens ! Comment se porte le général Castellane? et à ce nom qui nous unit d'une soudaine amitié , notre jeune voisin retrouvant une volubilité dont nous ne l'aurions pas cru capable , s'informe du plus ou moins de véracité de toutes ces histoires qu'on prêtait à l'illustre défunt, et qui couraient déjà la Suisse et l'Allemagne : Champs foulés par les hussards , et après un dédommagement princier, paysans venant prier qu'on veuille bien ravager leurs récoltes ; boutte-selle au milieu d'un bal ; sentinelle répondant l'arme au bras ; officier mis aux arrêts pour avoir puni un soldat; rivière passée au galop ; jeune dame voulant aller en voyage et réveillée par un coup de canon tiré sous ses fenêtres ; barbier socialiste; les bottes de cent francs ; boutique de pâtissier mise au pillage par des enfants ; bain pris avec un chapeau d'ordon- nance ; histoires vraies, contes bleus, exagérations fantastiques, tout se trouvait admirablement classé dans la mémoire du jeune ministre protestant, notre compagnon de voyage , qui ne con- naissait peut-être pas les noms célèbres des Vaillant, des Magnan, des Pélissier , mais qui avait passé de longues heures de récréa- tion à écouter des récits dont le héros était plus connu que s'il eût gagné des batailles. Les journaux nous ont raconté avec détail cette vie qui compte plus de journées de combat qu'on ne le croit communément : « Le caractère turbulent du jeune Castellane, dit Vapereau, le « destinait à la carrière militaire. Il entra comme simple soldai « au 5 e d'infanterie légère en 1804, et passa par toute la série « des grades inférieurs. En 1806 il était sous-lieutenant au 24e « de dragons, lorsqu'il partit pour l'Italie. Il fit la campagne