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h'"È DÈS PROGRÈS DE LA SCtENCK ou de crise, d'où bientôt l'ordre et l'unité sortiront, sinon la science périrait. Est-il permis d'espérer que l'histoire elle-même suivra de plus ou moins loin ce mouvement de la science? C'est là surtout que les faits se multiplient tous les jours d'une manière effrayante, c'est là que tout s'accumule et que rien, à ce qu'il semble, ne se simplifie. Tour parler comme Bacon, l'histoire est la forêt des forêts, sylva sylvarum. Quand d'un côté je considère combien déjà est longue la chaîne des temps écoulés ; quand, de l'autre, je vois que la mode est aujourd'hui de fouiller dans les plus petits recoins du passé et jusque dans les infiniment petits de l'histoire, je suis plein de compassion pour la tâche de l'historien du X1X« siècle. Remarquez encore que, non seulement, à mesure que l'humanité avance, le nombre des événements augmente, mais qu'ils semblent se presser davantage les uns les autres; ne voyez-vous pas avec quelle rapidité l'histoire se fait aujourd'hui sous nos yeux? Qu'adviendra- t-il donc, les choses allant de ce train, des historiens dans quelques siècles d'ici? En vérité, je crains qu'ils ne soient réduits à désirer, dans le fond de leur cœur, quelque catastrophe qui les délivre au moins d'une partie de ces livres, de ces manuscrits, de ces correspondances, de ces pièces diplomatiques, de ces proclamations, de ces journaux, de ces collections immenses de toute sorte dont ils seront accablés. Mais plutôt, sans doute, que de faire appel à quel- que nouvel Omar, l'histoire, forcée de devenir plus philoso- phique, s'allégera d'une partie de son bagage, pour ne plus considérer que les grands événements, les causes princi- pales, les mœurs et les institutions, les lois de la marche de la civilisation ; ainsi rentrera-t-elle , elle aussi , dans ce double mouvement de la science , qui seul assure la perfec- tibilité indéfinie de l'intelligence humaine.