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 436                  LA TOUR DE SAINT-DENIS
     Aujourd'hui, après des siècles écoulés, la plaine est encore, au
  couchant, peu travaillée ; de fiévreux marécages dorment au loin
  le long de la rivière d'Ain, et tandis qu'à l'orient, on ne voit
 que riantes moissons et coteaux fertiles, l'œil parcourt à l'occi-
 dent de vastes étendues, sans découvrir ni un arbre ni une ha-
 bitation.
    Mais, à ces époques primitives, lorsque la plaine eut apparu
 aux yeux, nue et déserte, lorsque le sol eut verdi sous l'in-
 fluence des printemps, notre belle colline couverte, ainsi que
 les cimes voisines, d'épaisses et sombres forêts, ne perdit pas
 son importance. De tout temps les peuples, même les plus pri-
 mitifs, ont connu l'usage des signaux: les feux allumés sur les
 hauteurs ont toujours porté des nouvelles, et la digue naturelle
 si longtemps baignée par les eaux, continua d'être la sentinelle
 avancée qui appelait aux armes la population des montagnes,
 et à signaler les dangers qui pouvaient surgir, au couchant et au
 midi, de ces horizons lointains et inconnus.
    Ce fut alors que des familles de bergers vinrent se fixer au
 bas du signal gardé par les guerriers de la tribu. Comme ces
pionniers hardis qui font reculer le désert, quelques pasteurs
sortirent des forêts et, confiants dans leurs armes et leur vigi-
lance, abandonnèrent la sécurité des hauts lieux, pour habiter
une plaineouverte aux excursions des ennemis ou des maraudeurs.
    Cependant, le temps marchait. Partout, dans la Gaule, les
tribus se réunissaient en nations , et deux peuples braves et
puissants, les Allobroges et les Séquanes, s'organisaient dans
les Alpes et le Jura. Entre ces deux nations guerrières, un
petit peuple pasteur, les Ambarres, établi entre la Loire et la
rivière d'Ain, poussait ses frontières jusqu'au pied des monta-
gnes, et pour se préserver contre les courses de ses turbulents
voisins, fortifiait les crêtes du Revermont, les contreforts du
Bas-Bugey et particulièrement un vieux rocher qui dominait la
gorge profonde d'où s'échappait l'Albarine. Rassurés et pour
profiter d'une position charmante, les Ambarres bâtissaient
presque au pied de ce rocher la petite ville d'Ambérieux, et
mettaient la limite extrême de leur frontière, sous la protection