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92 RAPPORT DE M. J. MOR1K. de l'exagération. Le tableau est assombri plus que la réalité ne le voudrait, et quelquefois aussi l'indication du remède va jusqu'à l'impossible. J'ai déjà dit que la réparti- tion des salaires entre les travailleurs des deux sexes ne peut qu'être proportionnée à la valeur des services rendus, puisque le salaire se mesure au produit opéré et non à l'agent de ce produit. Dès lors, s'il y a lieu de rechercher les causes factices d'inégalité et d'y remédier, il faut bien se soumettre aux causes naturelles. En second lieu, la femme, du moins la femme mariée, ne peut donner au travail extérieur que le temps qu'elle est libre de soustraire au gouvernement de la maison et des enfants. C'est même une triste nécessité que la femme, en de trop nombreuses circonstances, soit obligée de détourner une partie de ses heures de cette occupation qui devrait être l'unique de son sexe, et, s'il y avait un idéal auquel on dût aspirer avant tout, ce serait que le salaire de l'homme fût élevé au point de suffire aux besoins de la famille, sans les ressources du travail de la mère et delà fille. L'auteur du mémoire me paraît se tromper encore, lors- qu'il attribue aux réformes de 1789 et a l'ordre qui en est résulté dans la société et dans la famille, les misères qui frappent la femme sous le rapport économique et qui sus- citent le trouble moral. Suivant lui (ou plutôt suivant elle) la fille et la femme avaient, dans l'ordre ancien, deux pro- tections qu'elles ont à regretter, le Château et le Couvent. Je remarquerai en passant que la réhabilitation de l'ancien régime est habituelle, soit a ceux qui ont entrepris d'y ramener la société par une marche en arrière, soit a ceux qui le regardent comme bien mort, mais qui considèrent notre régime nouveau de liberté individuelle et politique comme un état transitoire, chemin d'une organisation radi- calement sociale. Eh bien! les uns et les autres font des