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ALLOCUTION DV PRÉSIDENT. j 77 faites prémices, c'est le fruit accompli dans la douceur de sa maturité, dans la verdeur de sa sève. Les orateurs sèment leurs essais dans leurs carrières diverses, les académies ne recueillent que leurs chefs-d'œuvre. Ils y entrent avec l'éclat de leurs succès, l'expérience de leurs revers. Leur voix a acquis cette douce et puissante sérénité, qui laisse au soir toute l'ardeur du midi et semble lui rendre un instant les fraî- ches aspirations du matin de la vie, comme une aurore an- ticipée de la matinée immortelle déjà prête à éclore sous la main de la Providence. Ainsi la parole littéraire se pare de toutes les nuances, sans perdre la sienne propre; et, a travers toutes ces couleurs heureusement fondues, l'œil pénétrant voit saillir les traits principaux qui la caractérisent, l'universalité, la mesure, l'élévation. Ces caractères embrassent tout le but de la philosophie qui cherche l'unité par la variété, et l'élévation par la sagesse ; on peut dire qu'ils s'embrassent aussi les uns. les autres, car l'étendue de l'horizon en assure la sérénité et la sérénité à son tour en prépare l'éclat. L'âme, riche de pensées et libre de passions, s'élève d'un vol plus assuré jusqu'à l'éternel foyer dégagé de tous ses nuages et étin- celant de tous ses rayons. Ainsi la philosophie assiste à toutes les vicissitudes de la société sans se laisser absorber par aucune. Elle se mêle aux arts pour les guider par sa gracieuse sagesse, à l'in- dustrie pour relever son but et féconder ses efforts, à la législation pour interroger ses origines et éclairer ses pro- grès par la comparaison des devanciers et des contempo- rains, à l'aide duflambeauqu'elle promène sans cesse dans le temps et dans l'espace. Mais quelle sera son attitude à l'égard de la politique mi- litante? Peut-elle s'en isoler sans abdiquer son pays? Peut 12