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72 NOTICE entend le bruit de plusieurs voix sous sa fenêtre, et pres- que au même instant on frappe à coups redoublés à sa porte. La terreur s'empare de lui ; son premier mouvement est de ne pas ouvrir et de se cacher, mais il pense que ce serait exciter les soupçons, et, prenant un air d'assurance dont le danger lui faisait sentir l'importance, il ouvre... quel spec- tacle frappe ses regards ? Dominique blessé mortellement et porté par plusieurs personnes !... « André, lui dit le mourant, d'une voix éteinte, je n'ai que peu d'instants a vivre, mais j'ai voulu venir te dire un dernier adieu ; je meurs sans connaître mon assassin, hélas ! je ne croyais pas avoir d'ennemi. » Les assistants fondaient en larmes, et l'air attéré d'André fut interprété par eux pour le comble de la douleur. Ce fut donc dans les bras de son meurtrier que Dominique expira dans la nuit sans avoir soup- çonné de quelle perfidie il avait été victime. Après cet assassinat, André del Castagno, étouffant tout remords, pensa à jouir du fruit de son crime. Ce fut lui qui fit dans Florence cette peinture que la République fit exé- cuter après la conjuration des Pazzi, sur la tour du palais du podesth, et qui représentait le supplice des conjurés, ce qui fut cause que l'on changea son surnom de del Castagno, et qu'on l'appela dès lors Andréa degli impiccati. Cet artiste infâme vécut 71 ans, toujours en réputation. Ce ne fut qu'à sa mort, qui arriva en 1477, que pressé par le remords qui le toucha enfin, il avoua le crime horrible dont il s'était rendu coupable, et expira bientôt après au mi- lieu de l'indignation qu'excita la connaissance de cette atroce perfidie. Il fut enterré dans l'église de Santa Maria la Nuova où le malheureux Dominique avait aussi sa sépulture. Tels furent les événements auxquels donna lieu l'introduc- tion de la peinture à l'huile en Italie, telles furent les suites d'une rivalité indigne d'un artiste, mais dont on a vu dans