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DE 'SAINT-MAKTIN D'AINAT. 151
mystique de Mesale, et qu'a cherché à reproduire le célèbre
Owerbeck. 11 faut des peintres pour tous les besoins, pour toutes
les dispositions des esprits ; une parole ne fait du bien que quand
on est dans une préparation harmonique. Owerbeck convient aux
âmes parfaitement croyantes, qui savourent déjà les mystères de
l'Evangile et ses scènes touchantes, qui ont plutôt besoin d'être
édifiées que convaincues. Mais il en est d'autres, et c'est l'état
dans lequel se trouvent bien des intelligences d'élite dans notre
siècle, surtout parmi les savants , les littérateurs , les artistes,
esprits indépendants et peu mystiques, pour qui des airs trop
pieux et trop naïfs paraîtraient de l'affectation ou de l'illu-
minisme, et qui demandent, pour être attirées vers une œuvre
chrétienne, qu'on leur présente le christianisme par son côté
imposant, majestueux ; il faut commander leur admiration , les
étonner, les terrasser, en quelque sorte, par la gravité et l'auto-
rité du style. 11 faut aussi satisfaire aux conditions matérielles
que l'art exige : car, surtout dans cette portion de public instruit
et versé dans les secrets de la plastique, on ne trouvera de l'écho
qu'autant qu'il y aura de quoi admirer, sous le rapport de l'exécu-
tion et du rendu : on ne se contentera pas de la seule expression.
Nous n'en sommes plus au moyen-âge, où la naïveté, la simpli-
cité de la foi suffisaient pour soutenir un ouvrage. Depuis nous
avons passé par la science ; nous avons été même jusqu'à son abus.
iYous avons eu dans Raphaël l'alliance adéquate de la science et
du sentiment ; Michel-Ange a déployé dans son Jugement dernier
une connaissance anatomique prodigieuse. Depuis, l'art n'a pas
dégénéré au point de vue scientifique ; Le Poussin , Lesueur
étaient des dessinateurs savants. De nos jours, David, Ingres,
Orsel n'ont pas laissé dépérir cet héritage de savoir.
Toute peinture, qui veut être à la hauteur de notre époque,
doit donc, tout en retenant, s'il est possible, le sentiment des âges
inspirés, être une œuvre savante. Owerbeck, à ce point de vue,
est trop exclusivement un peintre de sentiment, exécutant avec
foi des pastiches du moyen-âge. C'est pourquoi les âmes pieuses
l'ont accueilli avec empressement; mais il a eu peu d'entrée dans
(c monde artistique , moins familier avec les pensées religieuses.