Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
[ Revenir aux résultats de la recherche ]
page suivante »
142                DISCOURS DE M. HEINRICH.

 Métamorphoses des dieux ; et les vers d'Ovide sont goûtés de
 cette société incrédule, et nous devons a leur immense re-
nommée d'avoir conservé le plus grand nombre des fables de
la mythologie. L'Arioste, Messieurs, c'est l'Ovide de la che-
valerie , qui, sur un ton léger, chante comme lui pour un
 siècle sceptique, et se raille avec esprit des croyances d'un
 autre âge. La chevalerie vit en effet au XVIe siècle comme le
paganisme au commencement de notre ère. François Ier a
beau se faire armer chevalier par Bayard, la chevalerie n'en
est pas moins dans l'esprit de tous une vaine cérémonie des-
tinée à disparaître, et dans les mœurs, un prétexte a la cor-
ruption. Le culte des femmes perdait a être transporté de la
rude société du moyen âge dans le monde raffiné de la Re-
naissance ; le règne des preux était fini, et si on lisait les ro-
mans qui célébraient leurs exploits, on y cherchait bien plus
l'histoire de leurs amours que celle de leurs combats. Aussi
les auteurs se tournent vers ces vieilles légendes, dont le
caractère merveilleux abritait tous les écarts de leur imagina-
tion. L'Arioste se plaît dans ces longs récits d'aventures ;
il aime à y montrer l'inépuisable fécondité de sa verve, cette
richesse de style qui lui fait sans cesse trouver de nouvelles
images et fuir la satiété , la où on le croyait condamné a une
redite monotone. Comme Ovide, il abonde en élégantes des-
criptions ; il loue ses héros comme Ovide louait ses dieux,
laissant souvent échapper, au milieu de l'éloge, ce sourire que
trahit plus d'un passage des Métamorphoses ; enfin, pour der-
nier trait de ressemblance, il semble aussi que le vers soit la
forme nécessaire de son ingénieuse et facile pensée, tant son
harmonieuse strophe a de grâce, de souplesse et de naturel.
Il sera curieux de lui comparer les naïfs récits du moyen âge,
de lui opposer ces vieilles chansons de gestes, et cette chro-
nique de Turpin qu'il cite imperturbablement après chacun
de ses brillants mensonges. Ce sera notre introduction a