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132 DISCOURS DE M. HEINIUCH. Les règlements qui régissent renseignement des littéra- tures étrangères me prescrivent de m'occuper cette année de la littérature italienne, et j'ai choisi pour objet de nos études le XVIe siècle, le siècle de l'Arioste, du Tasse, de Ma- chiavel. Mais dans l'histoire littéraire comme dans l'histoire politique, chaque période ne peut s'expliquer complètement que par celle qui la précède ; je veux donc aujourd'hui, ap- pelant votre attention sur des considérations plus générales, vous parler des origines de la littérature italienne, et vous retracer rapidement ses destinées jusqu'à la Renaissance. C'est au cœur du moyen-âge, et au moment où les autres langues de l'Europe moderne ne faisaient que bégayer en- core leurs premiers essais, que l'Italie enfante une grande et durable littérature. Soit que la barbarie eût jeté de moins profondes racines sur ce sol si profondément pénétré par la civilisation romaine, soit que les agitations fécondes de la querelle du Sacerdoce et de l'Empire eussent donné à l'esprit italien une salutaire impulsion, l'Italie, trois cents ans avant les autres peuples, oppose a cette littérature latine, dont elle conservait le culte, une poésie digne de lui être comparée. Ses débuts toutefois ne sontpas exempts d'imitation étrangère. Le XIIe siècle avait vu fleurir une autre littérature, qui, bien que destinée a périr, exerça une puissante influence sur le moyen-âge. Les vers des troubadours provençaux, répandus et admirés en Italie, servirent de premiers modèles aux poètes italiens ; et a ces modèles vinrent bientôt s'ajouter les leçons des maîtres eux-mêmes, lorsque, après les croi- sades albigeoises, et la ruine des cours qui autrefois leurs donnaient asile, plusieurs troubadours implorèrent l'hospita- lité des princes de la péninsule. Frédéric II les accueillit, à leur double titre de poètes et d'ennemis du Saint-Siège. Toutefois ce n'était pas dans cette