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64 LES TOURISTES A ROME. fis la route de Rome à Marseille avec un Français, grand ad- mirateur de Mazzini. Son dédain pour la réaction cléricale était d'un rouge écarlate, et la restauration du pape par nos armes victorieuses lui paraissait un fait si monstrueux, que dans son indignation il avoua avoir honle d'être Français. Nous étions alors embarqués sur le bateau-poste de l'état, et Je dois dire que l'assistance fut unanimement scandalisée. Nous arrivâmes donc à Marseille, et là je fus témoin du culle très-positif que mon compagnon de voyage professait pour les beaux-arts. On nous conduisit à la Douane, qui nous fouilla et écorcha ridiculement. On nous fit même payer un droit sur la bénédiction du pape , car on exigea je ne sais quelle somme, pour les quelques chapelets que chacun rap- portait daas sa malle. Comme on le pense bien, notre pro- gressiste n'en avait pas; mais il était possesseur d'un tableau dont il faisait sonner bien haut le mérite. La douane, qui est fort intelligente, a imaginé de taxer même les œuvres d'art. Il me semble cependant qu'on devrait, par tous les moyens possibles, en favoriser l'introduction ; car on aura beau faire, on ne ressuscitera pas les vieux maîtres ni leurs écoles. Je comprends très-bien pourquoi le gouvernement pontifical met un droit de sortie sur des objets qui sont la gloire et la richesse de Rome, mais une taxe protectrice de 1 °/0 de notre part, est véritablement absurde. Nous devrions plutôt donner une prime d'entrée. Quoiqu'il en soit, l'amateur en question déballa son tableau, le baptisa du nom de Greuze, et l'estima 3,000 francs. L'employé étonné d'une déclaration, qu'il prenait pour de la bonhomie, chercha mille moyens dé- tournés pour faire comprendre au nouveau débarqué que la douane se contenterait d'une estimation de 100 ou 200 fr. Ce fut en vain : l'heureux possessesseur du Greuze problé- matique voulut absolument payer le droit de 1 / sur 3,000 francs, et il exigea un reçu bien authentique. La raison de