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60                 LES TOURISTES A ROME.

trouvé en compagnie de plusieurs artistes, exprimant devant
moi le désir de voir Saint-Pierre démoli par nos bombes, ou
renversé par la vengeance anti - catholique des assiégés.
J'avoue que mes rancunes artistiques ne vont pas si loin. Je
pourrais même, après la critique, écrire un long chapitre en
faveur de Saint-Pierre, cet admirable musée si rempli d'har-
monie, si resplendissant, et si curieux à étudier à cause des
diverses écoles qui, depuis la renaissance, ont illustré la ville
de Rome. Malgré les défauts signalés ci-dessus, l'aspect de la
fameuse basilique, de la place monumentale du Vatican et de
ses dépendances, est fait pour exciter une admiration faci-
lement justifiable.
   Les opinions du touriste en matière d'art sont souvent for-
mulées d'une singulière manière. Rien n'est plus étrange que
le jugement porté sur la Transfiguration de Raphaël. On en-
tend dire avec le plus grand sérieux : c'est lo plus belle pein-
ture qui existe; c'est une vérité mathématique que l'on
exprime ; c'est aussi clair que la valeur d'un lingot d'or,
d'autant plus précieux qu'il est plus pesant. Une fois que l'on
a yu la plus belle peinture, on est content et l'on peut se
 reposer. Dans cette même salle de la Transfiguration, où sont
placés trois autres Raphaël et le saint Jérôme du Dominiquin,
on n'a plus rien à regarder. On s'est pâmé d'aise devant la
plus belle peinture ; le reste ne vaut pas la peine d'un coup
d'oeil. Si, par la suite, on estime quelque chef-d'Å“uvre, on
fait le difficile, on critique, on prononce le mot de croûte.
 En effet, on a vu. la plus belle peinture, on est presqu'un
 artiste, au moins un docte amateur, et le pauvre vulgaire a la
 bouche fermée devant l'heureux voyageur.
    Comment voulez-vous que le touriste ne soit pas fier de
 ses connaissances en peinture? Outre Raphaël, qu'il connaît
 à fond, il sait encore son Saint Luc par cœur. Il existe à
 Rome une multitude de madones, la plupart byzantines, que




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