page suivante »
50 LES TOURISTES A ROME. qu'en général les fêtes ecclésiastiques de Rome sont dépour- vues de cette atmosphère religieuse à laquelle nous sommes un peu plus habitués. Les Romains ne sentent pas comme nous, et chez eux les idées payennes sont encore bien vi- vaces. Ils ne pourraient pas comprendre nos églises gothi- ques, lesquelles nous inspirent un recueillement mystérieux. Il leur faut de la musique d*opéra, des temples resplendissants de soleil et de dorure, des murailles tapissées de marbre lui- sant et de véritables musées de peinture et de sculpture. En outre, la pratique continuelle les a un peu blasés, et les yeux sont plutôt amusés que les cœurs touchés. A l'époque en question, il y a encore une recrudescence de curiosité ma- térielle, importée par la masse des touristes, et l'on peut affirmer qu'il n'est pas un lieu au monde où l'on entende plus mal la messe, le jour de Pâques, que dans l'église de Saint-Pierre de Rome. J'ai dit que la bénédiction urbi et orbi est réellement une scène très-imposante ; cependant, j'ai souvent entendu exa- gérer l'influence religieuse de cette cérémonie. Ainsi, on prétend qu'au moment où la voix du pape se fait entendre, la foule se met à genoux comme un seul homme. J'ai été témoin bien des fois de ces bénédictions pontificales, tant à Saint-Pierre qu'à Saint-Jean-de-Latran ; la multitude est généralement dans une attitude respectueuse ; mais ce n'est qu'une petite minorité qui se met à genoux. Je me suis trouvé à Rome en 1847, au moment du plus grand enthou- siasme en faveur de Pie IX, et alors, comme plus lard, les choses se passaient ainsi que je viens de le raconter. J'ajouterai que les bénédictions papales, données à l'église de Saint-Jean- de-Latran, offrent un aspect encore plus grandiose que celles du Vatican. En effet, la loggia est d'une dimension considé- rable, et le magnifique paysage qui accompagne cette scène accroît singulièrement le prestige de la cérémonie.