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46H DE LA PUISSANCE ECCLÉSlASTIQVjF que nous ne pouvons en reconstruire l'ensemble qu'avec les ac- tes des pontifes et les principes qu'ils proclamaient à l'appui. Les papes, et au-dessous d'eux les autres princes de l'Eglise, exerçaient, chacun à son rang, l'autorité religieuse qui n'a pas besoin d'être définie. La barbarie des esprits était-elle favorable à cette autorité? On peut en douter. Au moyen âge, comme aujourd'hui, le pouvoir religieux était tantôt respecté et tantôt méconnu. Mais quelque paradoxale que puisse paraître mon assertion, je suis convaincu qu'il était alors méconnu plus sou- vent qu'il ne l'a été depuis. En effet, pour ne rien dire de la ru- desse des mœurs ni de la grossièreté des temps, il était bien plus étendu et en même temps bien moins réglé qu'il ne l'est de nos jours. Il se confondait avec tous les autres pouvoirs qui en sont séparés maintenant. L'Eglise exerçait l'autorité judi- ciaire par ses tribunaux dont la compétence était extrêmement large , une partie de l'autorité législative par ses conciles. D'elle dépendaient les Universités et les études. Des territoires considérables étaient administrés directement par ses ministres. Quels étaient les effets à un tel état de choses ? C'est que par- tout où s'élevait un conflit, une opinion nouvelle, une lutte même ou une révolte contre les pouvoirs existants, le pouvoir religieux était nécessairement attaqué. L'Eglise jugeait, légifé- rait, réglait l'enseignement ; elle fixait les opinions, gouvernait. Mais, mêlée si intimement à la vie du siècle, elle était aussi combattue, aussi minée que peut l'être aujourd'hui le gouverne- ment laïque , et elle passait par les mêmes péripéties de force et de faiblesse. Au fond, ses conditions étaient autres que ne sont ses conditions actuelles ; il est douteux qu'elles fussent plus avantageuses et que son action sur la société fût mieux assurée. Mais laissant de côté une thèse, dont il serait trop long d'ap- porter ici les pièces justificatives, je dois plus particulièrement caractériser la part que prit l'Église au gouvernement, et surtout à celui de la France. La France ne commença qu'au XIVe siècle à avoir une ombre assez pâle d'assemblées législatives ; ce ne fut également qu'à la même époque qu'elle eut des tribunaux royaux réguliers sui-