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                    LOUIS-PHILIPPE D'OKLÉANS                         139

    La retraite de M. Dupont de l'Eure suivit de près celle du
vétéran de 1789. L'exercice ministériel de M. Dupont de
 l'Eure , esprit médiocre, citoyen probe , austère et d'un dé-
sintéressement antique , n'avait été pour ainsi dire qu'un long
 duel entre le brusque républicain et l'obséquieux monarque,
 auquel ce nouveau Roland pardonnait avec peine la supério-
rité du rang suprême. Lorsque M. Dupont de l'Eure entra dans
le premier cabinet formé par le duc d'Orléans : « Monseigneur,
dit-il au prince , je ne crois pas qu'en vous suggérant de me
faire ministre, on vous ait donné un bon conseil. D'abord ,
je ne m'aveugle point sur ma capacité , et puis , franche-
 ment , il n'entre point dans mes goûts d'être ministre.... je
suis tout franc , tout rond , dissimulant peu ce que je pense ,
et, si je me connais bien, très peu propre à faire un homme de
Cour. — Que parlez-vous de Cour? objecta le prince , est-ce
 que je veux une Cour ? Ah ! Monsieur, si vous saviez combien
jeregrelte de ne pouvoir vivre citoyen de la république fran-
çaise !... — Permettez , Monseigneur , les choses ne se pré-
 sentent point de la même manière dans des situations diffé-
 rentes. Je me suis reporté d'un bond à 1789. Je veux bien
renouveler l'épreuve faite à celte époque ; mais c'est dans
l'espérance qu'on travaillera franchement non pas à roy aliter
la France , mais à nationaliser la royauté , si cela est en-
core possible. — Est-ce que , par hasard , répliqua Louis-
 Philippe, vous auriez, M. Dupont, la prétention de vous
croire plus patriote que moi ? apprenez que je le suis plus que
vous. — Plus , ce serait difficile ; autant, c'est assez , et je
 m'en contente. —Vous n'en doutez pas, je l'espère? —
Ecoutez donc , Monseigneur, je le désire, mais je puis vous
le dire sans vous offenser : il y a certitude d'un côté , et seu-
lement espoir de l'autre ; en un mot, je me connais, et je n'ai
 pas l'honneur de vous connaître (1). »
  (2) Louis-Philippe et la Conlre-révolulion, etc., lome 2, p. 59.