page suivante »
	 					
		
						
		
		 
		
	 
	172                   ROME AU SIÈCLE D'AUGUSTE.
 du monde, puis, par un brusque et légitime retour, les es-
 claves de Tibère.
    Nous voudrions transcrire ici des pages entières ; le lecteur
 y gagnerait beaucoup; mais nous devons nous borner à
 quelques rapides indications. Parmi les lettres auxquelles
 nous donnerions volontiers le nom de lettres politiques ,
 parce qu'elles analysent le fond des institutions et du gou-
 vernement romain, nous citerons la 44 e . Elle offre une image
dramatique , saisissante, pleine d'émotion , d'une séance du
 Sénat (1). L'avilissement et la décrépitude de ce corps autre-
 fois si puissant, de cette curie , ame de la république et dé-
 positaire de ses pensées les plus profondes , devenue bientôt
le jouet des despotes et de leurs favoris ; cette assemblée de
rois dont la vue imposante confondait Cinéas, et qui rampait
alors aux pieds de Séjan, ou frissonnait à la voix meurtrière
des délateurs; tous ces tableaux éloquents et complets fixent
longtemps les regards et la réflexion. Nous regrettons pour-
tant qu'à ce propos M. Dezobry, toujours si attentif à relier
aux actes féroces ou perfides des empereurs les glorieux ou
pathétiques souvenirs de la gloire et de la liberté , ait oublié
ou omis la peinture de quelques assemblées orageuses et gro-
tesques du sénat dans Rome républicaine. M. Dezobry. chez
lequel une omission ne peut être que volontaire , et qui dé-
couvre avec une singulière sagacité les liens des sujets, n'au-
rait-il pas trouvé dans ce talent d'invention qui lui est propre,
un moyen naturel de rattacher à sa correspondance , cette
lettre familière de Cicéron, que M. Villemain a citée et tra-
duite dans son Cours de littérature (2) ; lettre admirable et
passionnée, curieux épisode de l'éloquence sénatoriale dans
la patrie de Caton et de Scévola , impérissable monument de
ces haines fougueuses qui, dans la salle même où siégeaient
ces graves Pères Conscrits semblaient déchaîner la rage et les
grosses paroles de la place publique. Oh ! que les hommes
ont changé depuis ! Et que les siècles se ressemblent peu !
   Au point de vue de l'histoire générale et de l'administra-
tion , nous aurions encore à signaler ici l'élude originale et
savante consacrée par M. Dezobry au gouvernement des pro-
vinces (3). Toutes les formes de ce gouvernement, son per-
sonnel et ses prescriptions, son mode d'exercice et ses affreu-
  ( 0 T. ir, p. a.58. —(2) Tableau de lalitt. fr. an xvmB siècle , t. iv,p. 20.
  (3) T. m, p. m '
					
		