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                         LOUISE LABÉ.                           205

prime elle-même, et celte nature est déjà bien riche et bien
poétique sous le ciel de la place Bellecour. Lyon fut en
effet la Parthénope de celte muse modeste, et elle n'eut pas
besoin des faveurs d'un Auguste pour s'y créer un palais
phéacien et des jardins d'Alcinous. Ni la vigne, ni l'oli-
vier n'y faisaient défaut. Les lys y florissaient dans toute leur
splendeur, car de môme que Louise Labé était bonne catho-
lique, elle honorait le roi de France. Quoique cette remarque
ait aujourd'hui beaucoup perdu de sa valeur, elle en reçoit
une nouvelle de l'ensemble de la religion et des croyances
de celte femme ; il se trouve qu'elle a respecté toutes celles
qu'elle trouva établies. Sa vie est un poème à part, et, pour
elle, la liberté d'écrire n'est pas celle de discuter un dogme,
ou de créer une religion, mais de traduire les sentiments de
son ame. C'est même celte pureté de forme, cette exclusion
savante de tout mouvement étranger au domaine d'un esprit
féminin qui la classe et qui la maintient parmi les poètes.
Si elle eut écrit pour ou contre la réforme, ses pamphlets
seraient oubliés avec ceux de l'atrabilaire Calvin qui l'atta-
qua avec emportement, sans doute à cause de ses rapports
avec Gabriel de Saconay. Elle conserva le génie de son sexe
dans ses écrits, et ce genre de supériorité est celui qui con-
sacre aujourd'hui sa mémoire et son nom.
   Le sort l'avait mise dans une position à souhait pour une
femme poète, elle s'y arrangea une vie toute de délices. Elle
eut beaucoup de beaux livres, mais sans s'y enterrer complè-
tement; elle sut beaucoup de langues, mais sans être pour
eela une femme savante. De pédantisme dans ses écrits, on
n'en rencontre pas l'ombre. Le luxe non plus ne l'éblouit
point. Les fêtes qu'on lui donne, elle les accepte parce qu'elle
était née pour y briller, parce que sa beauté, sa grâce, son es-
prit la rendaient l'ame de ces joustes et de ces tournois et de-
vises des grands seigneurs du temps.




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