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CÔME, LE LAC ET SES BORDS. 117
catif : on emprunta, à une église voisine, un nom de paix et
d'oubli, le doux nom de St-Fidéle.
Et, maintenant, comment fut suscitée l'action; qui souffla
l'orage; qui répandit l'argent corrupteur parmi les basses
classes du peuple; qui fit venir, des lieux voisins, des hom-
mes dévoués jusqu'à la servilité féroce; comment et par qui
fut enchaînée la garnison dans ses casernes, afin de laisser
passer la justice du peuple? je le sais bien et je pourrais le
dire ; mais je ferai comme le philosophe : je n'ouvrirai pas la
main pleine de vérités. Plus d'un nom contemporain, honoré
depuis, pourrait se mêler fâcheusement au récit. C'est justice
d'ailleurs de reconnaître que le fait trompa l'attente. On vou-
lait, sans doute, moins de férocité et plus de suite et de por-
tée politique dans l'action. On ne voulait pas un meurtre isolé
et inutile ; on voulait une révolution et un établissement
nouveau. On voulait se faire pouvoir sur les ruines de la do-
mination expirante. On rêvait enfin une sorte de république
patricienne, comme jadis à Gênes et à Venise. La tentative
se décorait d'un sentiment de nationalité qui s'égara dans une
explosion atroce, pour se taire et s'affaisser ensuite sous une
domination nouvelle qui s'établit bientôt comme une simple
prise de possession. Après la France, l'Autriche. La Lombar-
die n'eut qu'un seul jour, et ce jour fut taché de sang.
Quant à la populace, elle n'avait été, — c'est son lot fatal,
— qu'un mandataire violent qui dépasse son mandat, un ins-
trument furieux qui tranche dans le vif et opère mal. Peu
après, la déception amena la réflexion : on se prit à songer
que ce ministre Prina était une victime inutile et regrettable ;
qu'après tout, c'était un homme habile et honnête, et on par-
donna à sa mémoire jusqu'à l'impôt sur le timbre qui avait
servi de prétexte à l'insurrection.
Aujourd'hui, les plus sages et les plus éclairés détournent
la vue de ce fait ; ils songent tristement que la Lombardie a