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A BOURGOIN. 13 ques-uns des faits que je vais rapporter: l'exactitude de leur récit est constatée par la correspondance de celte époque, dont j'ai produit de nombreux extraits comme pièces justifi- catives. L'auberge de la Fontaine d'Or, à Bourgoin, n'a été dé- truite que depuis peu, à la mort du propriétaire. Jusque là , on avait conservé, respecté le réduit où avait logé le grand homme. — Ces diverses circonstances expliqueront sans doute l'intérêt que j'ai attaché à ces notes. C'est un journal et non une histoire que je transcris ; qu'on ne s'étonne donc pas de la minutie de certains détails. À Bourgoin, Rousseau comptait plusieurs amis : il avait autrefois connu M. de Champagneux père; le fils, qui habitait alors cette ville, avait conservé des relations suivies avec lui ; les protecteurs puissants qu'il avait à Grenoble, étaientà même de le soutenir; il se trouvait à proximité.de Lyon, où plu- sieurs familles honorables lui donnaient des marques de bien- veillance. Résolu de se livrer à son étude favorite, à la botani- que qu'il cultivait avec passion , le pays le plaçait à cet égard dans les conditions les plus favorables. Aussi, à peine installé dans le cabaret du nommé Lavigne, il le fit savoir à Thérèse Levasseur, pour qu'elle vint le rejoindre apportant les livres, la collection de plantes qui lui restaient, composant alors toute leur fortune. Les papiers, les lettres, les manuscrits furent déposés par son ordre, chez des amis; cette confiance devint, plus lard, l'origine de récriminations nombreuses et de plaintes amères. Plusieurs de ses dépositaires, en effet, se montrèrent infidèles, et abusèrent du dépôt qui avait été remis en leurs mains. Plus Rousseau se voyait malheureux, plus il croyait avoir à se plaindre des hommes, et limitait le nombre de ses r e - lations intimes, plus son affection semblait augmenter pour la femme à laquelle il s'était attaché depuis vingt-cinq ans,