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490 MON VOYAGE A PARIS. Infâme caricaturiste, m'écriai-je, indigné, eu froissant ce maudit passeport dans mes mains crispées ! Infâme caricatu- riste, car ta description, comme lu l'appelles, n'est pas un por- trait, mais une calomnieuse caricature! Crois-tu donc que j'irai présenter ton offensante recommandation à tous préfets, inaires el commandants ]de garnison de ton pays? Crois-tu que j'irai exhiber ton malencontreux passeport dans toutes les villes de France où j ' e n t r e r a i , afiu d'essuyer les sarcasmes des soldats qui en gardent les portes, ou les malins souri- res des employés subalternes? Impudent chargé d'affaires, puisses-tu êlre chargé de malédictions. Tu pensais le jouer de moi, méchant scribe! tu t'es t r o m p é . Je n'aurai pas la mala- dresse de mettre moi-même en circulation ma propre carica- ture. Je ne serai pas assez sot pour porter mon or dans la Fiance, au détriment de ma vieille Angleterre. Peu m'importe ce que pourront penser et dire Jes Muggins. Après loul, ma vie ne dépend pas de Pénélope Muggins et des quatre mille livres sterling formant sa dot. 11 a raison le vieux proverbe qui dit : « Il y a encore du bon poisson à prendre dans la mer. » En achevant ce magnanime soliloque, je jetai de côté le passeport, le dictionnaire, le Guide de l'Etranger à Paris, el le Trésor de l'Ecolier anglo-français, je pris mon chapeau e l , me précipitant hors de chez moi, j'allai rafraîchir mon sang par une promenade. Je parcourus Oxford-Slreet, puis Regenl-Street. Je passai avec une dédaigneuse indifférence devant les bureaux de Y Aigle Royal et devant ceux de la compagnie du Taureau , sans même y jeter un regard, el comme si je n'avais jamais pensé à utiliser leurs services pour faire un voyage sur le continent. Je continuai ma promenade en sentant le calme re- naître de plus en plus dans mon â m e . J'arrivai enfin dans Hay-Market], ayant reconquis toute ma tranquililé morale habituelle. Je marchais en réfléchissant sur loule l'affaire qui m'avail si