page suivante »
460 DU CARACTÈRE RELIGIEUX philosophie, voilà aussi l'unique point de vue sous lequel on peut légitimement rechercher si une philosophie est ou n'est pas religieuse. Placés à ce point de vue, vous n'hésiterez pas sans doute à reconnaître, avec moi, un caractère religieux dans une philosophie qui pénètre les âmes de l'idée de Dieu, de son action sur l'homme et sur le monde, et de sa cons- tante participation avec les créatures. Vous appellerez reli- gieuse une philosophie qui ne se borne pas à établir, en passant, pour la mettre ensuite à l'écart, la vérité de l'exis- tence de Dieu, mais qui la place au sommet de toutes les vérités et de toutes les idées, qui lui rapporte tout et lui ramène tout. Vous jugerez qu'une telle philosophie, loin de dessécher les sources du sentiment religieux, les ranime dans les âmes, et a droit à la reconnaissance profonde de tous les hommes qui ont à cœur le développement de l'idée r e - ligieuse et du sentiment religieux. Or, je crois que tel est le caractère delà philosophie éclectique, ou pour préciser encore davantage la question, de la philosophie enseignée aujour- d'hui dans l'Université. Quelle place l'idée de Dieu doit-elle tenir dans tout système un peu profond de métaphysique? La place qu'elle tient dans la réalité, dans l'ordre moral et dans l'ordre social. Nulle idée ne doit passer avant elle, nulle ne doit attirer sur elle, à un plus haut degré, tout l'effort de la pensée philosophique. En effet, c'est à l'idée de Dieu que nécessairement nous reportent toutes les idées des choses qui passent, qui ont des limites, qui ne contiennent pas en elles-mêmes la raison de leur existence. C'est à elle que nécessairement nous arrivons en remontant la série des causes, ou bien les anneaux de la chaîne des êtres. Inquiet et tour- menté, l'esprit continuellement s'agite au sein de toutes les autres idées; dans l'idée seule de Dieu, il s'arrête et se r e - pose. Dans l'ordre de la vie humaine comme dans l'ordre de la