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300 MAZADE D ' A V È Z E . située à trois lieues de son château, et où son père avait sa demeure, continua de fuir, et traversa ainsi presque tout le royaume. Il vint à Lyon, s'y reposa quelques jours, et de là se rendit à Paris. Les événements se précipitaient; d'Avèze, forcé de quitter sa patrie, alla chercher uu asyle sur la terre étrangère, tandis que sa femme et sa fille se cachaient à Sèvres, dans la cabane du jardinier de Brimborion, jadis la demeure des tantes de Louis XVI. Il fallut chercher quelque moyen de vivre dans le misérable réduit que l'hospitalité venait d'ouvrir ; nos deux recluses pourvoyaient à leur existence en travaillant à des gants au crochet, qu'elles allaient rendre, tous les samedis, à un honnête marchand du faubourg Saint- Denis, lequel ne manqua jamais de leur fournir du travail pendant les treize mois qu'elles furent ainsi cachées. Après la chute de Robespierre, d'Avèze rentra en France, et parvint à placer dans une maison d'éducation, à Paris, sa jeune fille, dont la condition se trouvait bien changée par des désastres accumulés. En sortant de pension, elle se réfugia avec sa mère chez une lanle, à Montpellier, pendant que le père restait à Paris, où il trouva des emplois qui lui permettaient, quoique de loin, de subvenir aux besoins de sa famille. Au bout de deux ou trois ans, il se trouvait à Lyon ; Bertille, sa fille, vint l'y trouver. Ce fut pendant ce voyage qu'elle écrivit l'Ermitage du Mont-Cindre, et qu'elle eut pour guide dans cette excursion notre célèbre compa- triote, M. P.-S. Ballanche, qui n'avait publié encore que ses Lettres d'un jeune Lyonnais, sur le passage de Pie "VII à Lyon, et son livre du Sentiment. Bertille venait d'atteindre sa seizième année, el M. Ballanche avail alors vingt-deux ans. C'est lui que la jeune voyageuse désigne dans les premières pages sous le nom de Pierre-Simon ; c'est le guide qu'elle désire voir arriver ; c'est lui qui, lorsqu'ils se trouvent tous deux dans l'ermitage, trace sur la muraille la pensée sui- vante : « Cet ermitage rappelle assez bien les destinées hu- maines. Resserré dans des bornes étroites, on y jouit d'une