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304 ténors dont la voix est très étendue, mais manque de moelleux et de charme; en adoptant le sombrer, ils dissimulent ce défaut capital, et leur organe rentre, sous ce rapport, dans la classe ordinaire, elle n'a plus rien de pénible à l'oreille, car bien que toutes les voix sombrées ne soient pas semblables chez tous les sujets, elles n'offrent pas, cependant, des différences aussi marquées, des caractères aussi distinctifs que les voix ordinaires. Ainsi donc, grâce à son intervention dans le chant, la force et le timbre des sons acquièrent une puissance plus élevée et une pureté incomparable ; elle ajoute beaucoup aux ressources de la nature. Ce nouvel emploi de l'appareil vocal, ce chant artificiel, si je puis m'exprimer ainsi, doit nécessairement influer, d'une manière fâcheuse, dans quelques cas, sur le larynx et ses annexes. L'hygiène démontre, en effet, qu'il a quelques in- convénients, que son action devient, dans quelques circons- tances, fâcheuse, soit pour la voix elle-même, soit pour l'état fonctionnel de l'artiste. Sous ce double point de vue, elle méri- tait donc de fixer particulièrement les regards des médecins. Il est évident que, puisque la voix sombrée exige un exer- cice spécial de la part de l'appareil phonique, le jeu, l'expres- sion, les caractères ne peuvent plus être les mêmes que dans la voix blanche: si, dans la première, le changement de ton s'accomplit avec plus de force, cette force ne s'accroît qu'au dépens de l'agilité : ces deux qualités se montreront donc en raison inverse l'une de l'autre. Ce n'est qu'un travail opiniâ- tre qui sera capable de rendre à la voix sombrée la souplesse, la flexibilité de la voix blanche. Si donc, par son énergie, par son ampleur, elle semble mieux convenir à la gravité, aux passions du Grand-Opéra, cette dernière sera d'un effet plus sûr, d'une convenance plus marquée, offrira un charme mieux senti dans l'Opôra-Comique et la romance. Ces traits distinc- tifs se rencontrent, sont saisissables même dans le sombrer