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59 phabet de la musique s'apprend dans les écoles primaires pres- qu'en même temps que l'alphabet de la parole. Grâce à ce perfectionnement fécond, nous pouvons espérer qu'avant peu régnera une harmonie universelle. Il se noircira bientôt autant de papier avec des croches et des double-croches qu'il s'en noircit maintenant avec des phrases de romans et des systèmes chaque jour nouveaux de palingénésie sociale. Nous sommes dans le siècle des philosophies de l'histoire, ou des histoires philosophiques. Quand donc l'histoire philosophique de la musique se fera, notre époque sera certainement i n - diquée comme une époque de progrès. Ce progrès sera d'au- tant plus facile à constater que l'historien aura dû exhumer des archives musicales d'un temps encore peu éloigné du nôtre, nombre de morceaux de musique pittoresque dont les litres suivants peuvent donner l'idée : « Journée du 10 août arrangée pour le piano et dédiée aux mânes de Guillaume- Tell,» ou « Bataille d'Austerlilz arrangée pour deux flageo- lets ; » Nous n'imaginons plus de semblables extravagances, le goût plus éclairé du public en ferait justice. Il n'existe pas, en France, de ville, même de médiocre im- portance, qui n'ait sa société plus ou moins philharmonique ; les congrès scientifiques ont donné l'idée des grandes réunions musicales. Ces réunions, qui ne sont encore qu'un accident, deviendront, sans aucun doute, périodiques, s'organiseront d'une manière régulière, et établiront entre les sociétés de plusieurs départements des liens durables d'association musi- cale. Ces associations existent déjà dans le nord de la France et en Belgique. Dans ce dernier pays qui offre l'exemple anormal d'une population à la fois artiste et industrielle, i' n'est pas de village qui ne possède une société de choristes ou de symphonistes. En France, le piano n'est plus seule- ment un instrument de musique, c'est un meuble, on le trouve partout. Chaque jour voit éclore une nouvelle méthode d'en-