Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
moi, à l'instinct de la durée, au besoin et à l'idée de la perfection,
et surtout de la perfection morale, qui ne peuvent nous avoir été
donnés en vain. Nous pensons que l'argument des causes finales,
joint à celui de la spiritualité du moi, trop vanté par les uns, trop
décrié par les autres, nous élève à tous les arguments contraires.
Mais cet argument des causes finales, auquel Kant attribue une valeur
 que nous ne contestons pas, qu'est-il au fond? Un principe de la rai-
 son qui nous fait concevoir une fin partout où nous apparaît un cer-
 tain ordre de moyens. Ce principe est certain pour nous, mais au
 même titre, ni plus ni moins, que le principe même qui nous fait
 concevoir une substance partout où nous voyons des phénomènes,
une cause où nous voyons des effets. La racine de ces principes est
dans la conscience : nous sommes une cause qui a conscience d'elle-
 même, qui s'aperçoit préméditer une suite de mouvements, en
 prendre l'initiative, la continuer ou la suspendre, distincte quoique
 non séparée des mouvements dont elle est le principe, et qui, dans
 leur développement extérieur, sont soumis eux-mêmes à des lois
 étrangères. Nous sommes un être, une personne qui s'aperçoit une
 et identique, simple et indivisible, sous la diversité de ses attributs
 les plus essentiels, et sous la pluralité indéfinie des phénomènes de
 toute espèce dont elle est le sujet. Nous ne sommes pas seulement
 une substance et une cause, nous sommes aussi une cause finale, à
savoir une cause qui produit certains effets, certains mouvements,
vers une fin dont nous avons conscience. C'est parce que nous som-
mes nous-mêmes une cause s'exerçant toujours dans un but, tendant
 toujours à une fin par certains moyens, que la raison accepte et
emploie le principe général des causes finales, au même titre qu'elle
accepte et emploie le principe de causalité et le principe des subs -
tances. Or, nous avons vu Kant accuser le principe des substances
d'être seulement un principe régulateur delà pensée, qui donne bien
un sujet logique, doné d'une unité, d'une identité et d'une simpli-
cité logique, mais sans aucune force pour nous faire connaître les
êtres eux-mêmes. Maintenant, de quel droit Kant attribue-t-il plus
de valeur au principe des causesfinales?Pourquoi ce principe n'est-
il pas à ses yeux, comme les autres principes de la raison, un prin-
cipe régulateurde la pensée, ne produisant que des combinaisons lo-
                                                         15