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 un des interlocuteurs devisant sur sa maîtresse à peu près
 comme faisait le preux Joinville dans un combat des Croi-
 sades, s'écrie avec ivresse. « Ilfaut se battre avec elle,
 « recevoir des soufflets, être accablé de coups et lui
 « en rendre         dieux! quelles délices!     »
    C'est là peut-être un des plus beaux monuments de
 l'antiquité. Il y a dans cette exclamation, dieux! quelles
délicesl.... après les soufflets donnés et reçus, un trait de
mœurs plein d'une expansive tendresse et très touchant.
    Battre ce qu'on aime est donc l'effet le plus naturel de
tout sentiment d'affection vive : ira mistus abundat amor.
Tous les poètes, tous les philosophes qui ont réfléchi sur
l'amour ont unanimement reconnu que les querelles des
amants sont une des armes les plus puissantes de ce dieu,
C'est ce qui fait faire à Grosley, notre savant Champenois,
la judicieuse réflexion que voici. « Si de simples querel-
« les produisent d'aussi bons effets, combien doivent-elles
 '<• en produire de meilleurs quand elles sont portées jus-»
« qu'aux coups. »
    Il ne serait pas difficile de prouver que cette coutume
de battre sa maîtresse fut toujours le privilège des époques
de haute civilisation. Il est à croire que, dans les siècles
qui suivirent la chute de Rome et qui précédèrent la Re-
naissance, cet usage fut enseveli sous les ruines de l'em*
pire romain, avec la politesse, les sciences et les arts.
    Telle est l'opinion de notre académicien Grosley, lequel
à ce sujet divise tous les siècles possibles en trois classes:
                    SIÈCLES BARBARES ;
                    SIÈCLES MITOYENS}
                      SIÈCLES POLIS;
  Dans les siècles barbares on n'aimait point quoiqu'on
battît.