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Chaque fait social porte l'empreinte de ces deux puis-
sances, l'une qui cherche à envahir, l'autre qui tend à
conserver. Telle est même la nécessité de cette succession
lente et graduelle, que si quelque commotion extraordi-
naire a lancé l'esprit humain dans une espace où cette
continuité de transactions paraît interrompue, alors le pas-
sé s'arme de nouvelles forces ; il saisit les opinions éton-
nées, inquiètes, effrayées, les ramène à soi et regagne sou-
vent une portion de ce qu'il a perdu. Dans ces réactions,
des vérités qui semblaient acquises à l'humanité se voient
de nouveau niées; les principes qu'on ne croyait plus
contestables sont cependant ouvertement attaqués, en
sorte que les esprits troublés ne savent plus si la tendance
de tout un siècle, si les efforts de deux générations ne
sont pas choses vaines, stériles, de pures illusions.
   Nous sommes, je le crois, dans une de ces époques que
je viens de décrire et cependant je crains de trop affirmer.
Car je me rassure en voyant à la tête de notre organisation
sociale des hommes qui, ayant présidé par la seule puis-
sance du talent au mouvement spirituel de notre âge,
doivent, quelque position qu'ils aient prise dans les luttes
récentes, défendre leur ouvrage. Ils y sont engagés par
leur passé, intéressés par leur gloire. Bien plus, je suis
convaincu que de toutes parts les intentions sont pures et
que les cœurs sont encore animés d'un amour sincère de
la liberté; qu'il ne faut pas s'en prendre aux personnes,
soit dans le gouvernement, soit hors du gouvernement,
mais à l'influence sous laquelle elles sont toutes, à cette
irritation des esprits causée par des faits malheureusement
trop réels, mais qui aveugle comme toute colère, prend le
signe révélateur du mal pour le mal lui-même. Mais enfin
cette irritation déraisonnable, à mon avis, existe. Elle réa-