page suivante »
oOO D'ailleurs, chaque idée renferme, dans l'ensemble de sa transmission, des proportions diverses. Il faut des précep- teurs pour tous les âges, comme pour toutes les sortes d'in- telligences. Le frère de l'école chrétienne, pour remplir une tâche pius modeste, plus laborieuse et plus sacrifiée, n'a-t-il pas sa place méritante, aussi bien que le professeur de la Faculté des Lettres? Si le ciel a doué celui-ci de qualités brillantes, qui répandent autour de son front une auréole plus lumineuse, il a mis dans le cœur du croyant la ferveur passionnée de l'œuvre accomplie. La mission de l'homme de génie a plus d'éclat; celle de l'homme de foi, plus de vertu. Ce fut avec l'ardeur, avec la ténacité de l'homme de foi que Guérin consacra sa vie à la propagation des idées mu- sicales, Cette passion, l'élément le plus actif de son carac- tère, fat aussi le secret de son influence. Bien qu'il l'ait ap- pliquée dans le rapport d'un savoir restreint et de facultés peu étendues, elle ne lui a pas moins constitué une place im- portante, puisqu'il a été par elle la personnification la plus populaire du mouvement musical à Lyon, parmi la classe la plus nombreuse et la plus inférieure de la bourgeoisie. Cette importance le désignait nécessairement à nous qui avons en vue d'expliquer, par des noms propres, les différentes phases de l'art dans notre cité, et non pas de discuter, à la façon des feuilletonistes, la valeur technique du talent de nos artistes. Aussi, nous ne déroulerons pas, une à une, les moindres circonstances biographiques de Guérin,— du point de vue où nous sommes placé, ce travail n'aurait aucune opportunité, et ne présenterait môme pas l'attrait d'événements variés ni piquants; la vie de notre héros a été toute d'une pièce. Guérin eut pour professeur M. Baùer. 11 arriva assez ra- pidement à vaincre les principales difficultés de l'instrument; et, soit que les ressources d'un enseignement complet lui eussent été refusées, soit qu'il n'eût point toutes les qua- lités essentielles, pour atteindre un grand talent d'exécution, il ne dépassa pas les limites d'une honorable médiocrité. Biais ce qui ne s'apprend point, et ce qu'il possédait à un degré éminent, c'était la compréhension vive et passionnée des grandes conceptions musicales. Tout ce qui était noble, beau, poétique, remuait l'ame impressionable de l'artiste. Ce qu'il éprouvait ne ressemblait pas à la jouissance ordinaire du musicien, lorsqu'il entend une œuvre selon son cœur, c'é~ iaît une exaltation profonde, qui l'ensevelissait tout entier