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3'ai interrogé le génie de Virgile sous les ombrages qui ont
protégé son berceau; et je voudrais pouvoir révéler tous les
secrets que Mantoue m'a appris.
   Lorsqu'on vient de Venise à Mantoue, on trouve, après
avoir traversé Padoue, des pays d'une culture grossière, des
campagnes sablonneuses où aucun village ne s'élève, où
aucune route n'est frayée. Ce désert commence au pied des
monts Euganéens, qui ont aussi abrité la retraite d'un grand
poète, de Pétrarque, et qui, couverts de ruines et de ronces,
ne cachent plus aujourd'hui que les vipères utilisées par la
thériaque. Dès qu'on a vu le vert sommet de ces collines
disparaître sous les chaudes vapeurs de l'Orient, on tombe
dans des chemins impraticables ; les chevaux suent, l'essieu
crie, les roues ont peine à avancer dans une terre sèche
et mouvante; de toutes parts s'étend une vaste mer de glè-
bes dures et soulevées, au dessus desquelles l'œil n'aperçoit
que le soleil qui les brûle. Là, on peut prendre une juste
image du labour pesant des peuples latins. Mais quand on a
passé l'Àdige, à Legnano, la verdure renaît; au milieu de
peupliers élégants, sous les berceaux des vieux saules, vous
roulez sur une route facile, à travers un paysage gras et fer-
tile. De grandes vaches traversent lentement les pâturages ;
du sein des herbes épaisses, les oiseaux s'élancent au ciel et
saluent cette heureuse contrée de leurs chants vifs et hardis ;
l'eau baigne de ses ruisseaux le pied de toutes les plantes, et
charge de ses perles leurs tiges les plus hautes ; tout révèle
une nature humide et féconde; tout annonce l'approche du
fleuve.
            l'roptcr aquam, lardis ingens ubi (lexibus errât
            Mincius, etlencrà prœlexil arundine ripas (1).

Arrivé sur ses bords, vous êtes frappé d'un spectacle inattendu:
  (1) Géorgie, lib. III,