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monde, les joies et les douleurs, les succès et les revers
qui apprennent à vivre, auraient eu mis en équilibre, en
meilleure sympathie, ce cœur dont il ne se plaignit jamais
et cette tête dont il commençait déjà à se plaindre.
Quant enfin ce quelque chose qu'il avait là , comme le
jeune Chénier, devenant compréhensible pour lui, lui au-
rait eu marqué son étoile sur la terre comme dans le ciel.
Non, ce n'était point une vie de magasin, ni un petit
intérieur qu'il fallait à De Loy, si bouillant, si jeune, si
poète ! On aurait dû le préserver de cette compression si
brusque de toutes ses facultés ensemble, et De Loy serait
encore de ce monde. Aussi, de ce malaise qu'on aurait pu
prévoir, survint le dégoût, le mal social, et du dégoût un
trouble dans l'économie de ses affaires. À ce point que, dès
cette époque, De Loy ne fut plus qu'un pauvre pèlerin qui,
une fois sa route manquée, ne fait plus que s'égarer à me-
sure qu'il avance.
Aussi, distrait de sa route , ne sut-il plus se retrou-
ver -, et Dieu seul connaît les peines et les fatigues que
ce voyageur perdu a éprouvées pour reprendre l'étroit
sentier qui pouvait seul le ramener au sein de sa famille.
Que de ronces, que d'épines semées sur cette route à con-
tre-sens, où sa timidité lui faisait fuir tous ceux qui pou-
vaient lui dire son chemin et le sortir de tant de mauvais
pas ! Combien de fois, étourdi par ses chûtes, n'a-t-il pas
perdu la tête? Pauvre Aimé, cette première meurtris-
sure, ce premier trait de nos institutions t'avait profondé-
ment blessé. Le dard était resté bien avant dans la plaie, tu
l'emportais, et quand tu fuyais, tu croyais fuir ta douleur!...
L'espoir de rétablir sa fortune lui fit, bien peu de
temps après, quitter la France. II s'embarqua pour l'A-
mérique du Sud, qui était devenue le refuge d'honorables
infortunes; pour la baie de Rio-Janeiro, que certaines
relations désignent sous le nom de France antarctique. Les
liens qu'il rompait n'étaient pas de ceux dont on se dé-
gage facilement : son cœur saignait des mille blessures que