Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
[ Revenir aux résultats de la recherche ]
page suivante »
                                     20
comme celle qu'il fit sur la génisse de Myron. Il en faisait à
tout propos, surtout sujet, ordinairement avec esprit, souvent
avec trop d'esprit : il suffisait de le toucher pour faire jaillir
une étincelle. Quand aucun sujet d'épigramme ne s'offrait à sa
pensée, il ne laissait pas oisive sa faculté versifiante : comme
les forgerons, qui, pour ne pas interrompre le mouvement de
leur bras, frappent sur l'enclume pendant qu'ils retournent le
fer, Ausone, en attendant qu'il eût tourné une nouvelle ma-
tière, frappait sur une épigramme grecque et la traduisait en
latin. Ces épigrammes ne sont pas les moins nombreuses de
son recueil.
   Il ne se bornait pas à des épigrammes : il composait beau-
coup d'autres pièces fugitives. Une des plus jolies est l'amour
attaché au gibet.
   C'est une bluette gracieuse, un rien charmant : Virgile lui a
 fourni l'idée de la scène par laquelle il commence , et le nom
 du grand poète semble lui avoir porté bonheur, Il peint d'une
 manière frappante ces champs aériens qu'habitent les héroïnes
victimes de l'amour :

            Errantes silva in magna et sub luce nialigna
            Inter arundineasque comas, gvavidumque papaver,
            Et tacitos sine labe lacus, sine murmure rivos (1).


Puis nous voyons défiler sous nos yeux tout le cortège des
amantes infortunées, cortège un peu long, malgré la diversité
du costume et la richesse de la versification. Tout à coup la
scène change. Au milieu de ces sombres ténèbres,arrive l'au-
teur de leurs maux, l'Amour. La fureur des héroïnes , leur
acharnement, leur vengeance, tout cela est décrit avec on ne


   (1) Errant dans une vaste forêt, qu'éclaire une lumière douteuse, parmi des
roseaux épais, de lourds pavots, et des lacs sans cascade, et des ruisseaux
sans murmure.